Future grande région : Occitanie ?
Publié le 01/10/2015 à 08:57 | La Dépêche du Midi | Daniel Hourquebie
202 357 votes et Occitanie en tête
Quel nom pour la future grande région ? / Photo DDM
Quel nom pour la future région ? La grande consultation engagée auprès des lecteurs par La Dépêche du Midi et les différents journaux partenaires a été nourrie de plus de 200 000 votes. Une mobilisation populaire inédite et c'est l'appellation «Occitanie». qui arrive en tête.
202 357 votants électroniques dont près de 60 000 sur le seul site de la Dépêche. La grande consultation populaire sur le nom de la future région issue de la fusion Midi-Pyrénées et Languedoc-Roussillon, lancée par les cinq quotidiens des deux régions (La Dépêche du Midi, Midi-Libre, L'Indépendant, Centre-Presse et La Nouvelle République des Pyrénées), a remporté un franc succès. Une opération commune inédite et le résultat en terme de participation est à la mesure des ambitions.
Les citoyens sont prêts à se saisir... de ce qui les concerne et on peut dire que le choix d'un nom porteur d'identité qui sera sans doute celui des élus régionaux devra forcément être irrigué par le sentiment citoyen. En espérant que le Conseil d'Etat qui aura le dernier mot (lire ci-dessous) joue aussi le jeu de la décentralisation. Le gouvernement a, de son côté, déjà affirmé sa volonté de «ni heurter ni gommer les identités locales».
Des identités... et des microclimats
Il faudra pourtant faire des choix. Et justement, le contenu de la grande consultation justifie parfaitement l'aphorisme «c'est la langue et la culture qui doivent nommer le pays». Sauf que le lecteur citoyen de la nouvelle future région – une entité pourtant très cohérente, en tout cas plus que d'autres, au niveau historique –, cultive souvent une conception originale de son identité, confirmant que l'affaire est complexe.
Il y a des microclimats culturels traduits par les réponses différenciées, selon les journaux concernés, dans les réponses à la consultation. Sur le site de La Dépêche, c'est Occitanie qui arrive largement en tête (34 %) devant Pyrénées-Languedoc (11 %) mais c'est l'appellation Occitanie-Pays Catalan qui explose les compteurs sur le site du journal l'Indépendant de Perpignan, un vote survitaminé (lire page suivante) qui traduit la forte mobilisation communautaire catalane sur son territoire. Alors, autant en emporte le Valls ? La grande question posée aux élus régionaux restera : comment fédérer sans exclure. Et bien sûr éviter la caricature qu'un souci exacerbé de la synthèse pourrait produire : qui voudrait habiter en Occitalogne ou en Catalonie ?
Une appropriation symbolique
Il reste à trouver ce plus grand dénominateur commun au vaste ensemble qui a déjà connu un territoire et des références communes durant les cinq siècles du comté de Toulouse, sur des bases géographiques, historiques et culturelles communément admises.
Après le vote de la réforme en deuxième lecture, La Dépêche du Midi posait déjà les termes du débat le 21 novembre 2014 : «La question du nom de la future région n'est pas anecdotique. Question d'identité justement. Il s'agit d'un enjeu majeur pour l'appropriation symbolique du nouveau territoire par les citoyens concernés. Et aussi pour son identification claire et efficace sur le reste du territoire français et dans le vaste monde. Pas simple !»
Il faudra bien sûr – aussi – entendre la voix des Sages. Et du premier d'entre eux qui reste (jusqu'à quand ?) encore prudent : «Le nom de notre future Région devra la porter, lui donner une image, l'identifier bien au-delà de ses frontières, indique Martin Malvy, président du conseil régional Midi-Pyrénées, à la parole d'autant plus libre qui ne se représente pas. Il faudra tenir compte de sa culture et de son histoire tout en sachant qu'il est impossible de tout résumer en un mot».
Un mot composé, alors ? «Non, un mot ! Il faudrait y arriver. Je dis bien, un mot, pas un sigle, reprend le Président. Languedoc, Occitanie pour faire la pige à la Californie ?» Seule certitude en l'état : «La nouvelle assemblée a devant elle un débat passionnant et sans doute, passionné à prévoir». La grande consultation l'a confirmé : c'est déjà bien parti.
Publié le 01/10/2015 à 07:13 | La Dépêche du Midi | Recueilli par Daniel Hourquebie
«Enfin une traduction spatiale de l'Occitanie»
Jean-Paul Laborie, Géographe, professeur émérite d'aménagement du territoire et d'urbanisme à l'université Jean-Jaurès / Photo DDM
Que pense le géographe du classement des noms établi par les lecteurs de La Dépêche ?
Le résultat n'est pas très surprenant, je m'y attendais et le choix de l'Occitanie correspond aussi au mien. Il y a une rationalité dans ce choix ce qui explique sans doute l'ampleur du score trois fois plus important que pour le nom arrivé en 2e position. C'est d'abord dû à la simplicité de l'expression. Vos lecteurs ont mis du temps à s'habituer au nom composé de Midi-Pyrénées mais une identité avait fini par se créer même si cela restait assez compliqué pour parler de la région à l'extérieur. En revanche, l'Occitanie parle à tout le monde. Ensuite, j'approuve ce choix parc e que le géographe que je suis pense que pour un nom de région, l'entité culturelle doit l'emporter sur le vocable géographique. Ce n'est pas paradoxal : en identifiant le nom d e région à une culture, on se projette dans l'idée de vivre ensemble.
L'Occitanie cartographiée, un rêve pour beaucoup ?
Evidemment, l'entité occitane est plus vaste que la nouvelle région créée. Mais en choisissant l'Occitanie, j'élis un terme qui existait déjà dans l'espace linguistique médiéval. Cela correspond à une réaction géographique innée du géographe. Cela va enfin donner une traduction cartographique spatiale à l'Occitanie, un élément qui va s'inscrire dans le marbre avec un contour précis alors que pour beaucoup, l'entité restait floue. C'est aussi une explication e ce vote : certains de vos lecteurs ont choisi l'Occitanie par simplicité, d'autres par conviction.
Si l'on y accole Pays catalan, peu de succès ici. Mais gros score dans les Pyrénées-Orientales
Rappelons que l'identité catalane a été scindée par le Traité des Pyrénées en 1659 avec la Catalogne Nord, la Cerdagne, rattachées à la France. Ce n'est pas rien ! Il reste donc un territoire et une entité culturelle et linguistique forte. Et le score que vous évoquez a pu être influencé par le débat puis le vote intervenu dimanche en Catalogne, de l'autre côté de la frontière. Le département des Pyrénées-Orientales est aussi un territoire qui se sent loin des centres de décision de Toulouse et Montpellier.
Au final, validez-vous plutôt le choix «Occitanie» des lecteurs de La Dépêche ?
Oui d'autant que c'est un terme qui exclut très peu. Sauf les Catalans justement. Le choix des élus prévaudra. Pour analyser ce vote, il faut aussi vraiment intégrer le changement majeur au sein de ces territoires depuis 20 ans, en particulier la croissance démographique, avec une installation de population très importante, des nouveaux venus qui, je le répète, ont besoin de s'identifier au territoire avec une appellation simple.
Publié le 01/10/2015 à 07:14 | La Dépêche du Midi | D.H.
Le choix des élus... et l'aval du Conseil d'Etat
/ Photo DDM
«Il faudra une affirmation forte de la part des citoyens pour que les technocrates n'aient pas le dernier mot». Jean-Louis Blénet, président de la Confédération des calandretas, dernier «grand témoin» interrogé par La Dépêche (notre édition d'hier) parle d'or. Un propos qui laisse cependant pointer une ombre d'inquiétude. On peut imaginer que demain, les élus feront un choix difficile mais porteur de sens. Mais le Conseil d'Etat après-demain ? Rappelons que les conseillers régionaux élus les 6 et 13 décembre 2015 tiendront leur première réunion le lundi 4 janvier 2016, ce sera le cas pour la nouvelle grande région issue de la fusion entre Languedoc-Roussillon et Midi-Pyrénées. L'une des premières délibérations concernera le choix délicat du nom de la nouvelle entité. Une proposition attendue avant octobre 2016 mais ce vote du nouveau Conseil régional (comme d'ailleurs le chef-lieu définitif) devra être fixé par décret en Conseil d'État pris avant le 1er octobre 2016.
D'aucuns craignent que la plus haute juridiction administrative manifeste sa pusillanimité face à des appellations qui incarnent l'identité des pays mais cela reste pour le moment du niveau du fantasme. Et on voit mal - sauf à appeler une nouvelle région Assedic ou Mégane comme le cas s'était produit pour des nouveaux nés - pourquoi les conseillers exerceraient une férule sémantique en contradiction avec une réforme territoriale censée porter haut la nouvelle phase de décentralisation. Et la décentralisation, c'est d'abord et aussi très symboliquement de laisser aux territoires le choix de leur dénomination à la condition que ce choix ne porte pas atteinte à la dignité ou aux intérêts fondamentaux des citoyens qui les composent.
L'enseigne de La Talvera à Cordes sur Ciel
Sélection d'articles réalisée à partir du site : http://www.ladepeche.fr
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