Goutrens (12) : Nos campagnes autrefois

6/10/2022

Publié le 25/07/2021 à 09:09 | La Dépêche du Midi | christophe cathala

Aveyron : les campagnes d’autrefois reprennent vie à Goutrens

La spectaculaire collection de Guy Ginestet nous plonge dans le Rouergue de la première moitié du XXe siècle. Nostalgie et pédagogie font bon ménage dans cette évocation des campagnes d’autrefois qui ont tant de choses à nous dire.

Chapeau noir sur la tête, foulard rouge autour du cou, Guy Ginestet donne le coup d’envoi de la visite. À 72 ans, cet ancien éleveur (bovins lait, puis agneaux à l’engraissement pour Roquefort) qui a passé le relais à son fils Emmanuel a eu peur, une fois parvenu à la retraite, de s’ennuyer.

Dès 2010, il passe ainsi des heures et des jours, des nuits parfois, à rassembler sous un ancien bâtiment d’élevage ce qui constitue le fil d’une passion née de son intérêt pour la vie des anciens et d’un goût prononcé pour le matériel d’époque. Une passion qui anime désormais, tout au long de l’année, son bonheur du partage avec ses visiteurs, sur fond de nostalgie d’un quotidien révolu.

Chiné dans toute la France
De cette moisson d’objets, de mobilier, d’outils de toute sorte (lire par ailleurs), Guy Ginestet fera le terreau d’un musée qu’il ouvre au public en 2012, lors d’un week-end de Journées du Patrimoine. Le succès est au rendez-vous, il ne fera que s’amplifier avec le temps, d’autant que le maître des lieux ne cesse jamais de compléter sa collection.

"J’ai commencé par un peu de matériel récupéré sur la ferme, mais très vite je suis allé chiner dans les brocantes et sur internet, le Bon Coin notamment…, explique-t-il. J’ai parcouru toute la France pour dénicher ce que je voulais, comme cette pompe à incendie qui vient de Verdun… Et j’ai trouvé beaucoup de matériel en Haute-Loire, allez savoir pourquoi". Quelques dons de petits objets viennent régulièrement étayer sa collection, certains d’entre eux sont "mis à disposition" par le voisinage. Chaque année apporte son lot de surprises.

Un dialogue ouvert avec le public
Pour donner corps à son musée, Guy Ginestet monte une association, "Nos campagnes autrefois", forte aujourd’hui d’une quarantaine de membres et de trois guides en saison qu’il a dûment formés à tout expliquer de cet inventaire paysan. "Et je continue à en apprendre sur la vie de ces objets, même si je les connais tous : beaucoup de personnes âgées m’évoquent leurs souvenirs, me racontent leur vie d’avant. Le dialogue s’instaure..", confie Guy Ginestet.

Qui fait de chaque visite un moment d’interactivité avec le public, enchaînant dans un parcours bien balisé les scènes de la vie d’autrefois, s’attardant sur un outil, multipliant les anecdotes en usant du patois pour ceux qui savent encore le parler.

Pour donner corps à cette vie d’autrefois, Guy Ginestet est allé plus loin encore, en confectionnant avec sa sœur (Reine) et une amie (Patricia Royer) quelque 53 personnages en habits d’époque et quelques vaches et chevaux, le tout en grandeur nature. De plus, pour accueillir les visiteurs, vingt autres personnages mettant en scène des métiers d’autrefois donnent le ton dès le parking. Ils proviennent de l’association "Lo Festaïre", de Rulhe, aujourd’hui dissoute.

Une dose supplémentaire d’humanité pour un musée qui n’en manque pas. Et qui cultive l’art de la pédagogie pour faire vivre le lien entre les générations.

Des trésors à (re) découvrir
Guy Ginestet ne saurait dire avec précision le nombre de pièces que réunit son musée. "Deux mille, peut-être plus", avance-t-il sans risque de se tromper, tant l’espace est vaste… et bien rempli. Mais il affirme en revanche : "Aucun de ces objets n’est en double !".

Face à une telle profusion, et avec les explications du maître des lieux, la visite (compter une bonne heure) se déroule sur une large boucle tracée dans le bâtiment, depuis laquelle, de part et d’autre, les thèmes se succèdent avec pour dominante l’activité des familles paysannes dans la première moitié du siècle dernier. "Tout ce qui est exposé date d’avant 1950, avant l’électricité et la motorisation", précise Guy Ginestet.

Mises en scèneDe très nombreuses raretés (comme ce pétrin électrique de 1930 ou cette sorbetière de 1925) voisinent avec des trouvailles insolites que le visiteur devra dénicher au fil des scènes reconstituées avec les personnages qui les font revivre. Le forgeron, le sabotier, Monsieur le maire qui marie un jeune couple, l’instituteur et ses enfants dans la salle de classe (une jeune fille, mise "au coin", porte même le bonnet d’âne), le café avec la partie de carte et les vermouths de l’époque dans le buffet qui voisinent avec un appareil à torréfier le café datant de 1937…

Puis on passe à une chambre d’enfants, une salle de bains, le cantou et la salle à manger au-dessus de laquelle pendent saucisses et saucissons. "On a bien rigolé en confectionnant ces fausses charcuteries et polystyrène avec des inclusions de tissu rouge", sourit Guy Ginestet. L’effet est saisissant, on en mangerait, comme on aurait pu le faire avec des cabécous en plâtre plus ou moins affinés et plus vrais que nature.

La basse-cour n’est pas oubliée avec ses volailles fabriquées main, qui naviguent autour de la traite de deux vaches couleur "salers".Un peu loin, s’alignent faucheuses, javeleuses, batteuses, mais aussi calèches et charrettes et un alambic des années 30, donné par la fille d’un bouilleur de cru de Rulhe d’Auzits. On s’attardera devant le cantou où un couple fait la conversation en patois., consignée dans un enregistrement. Il y est question du repas de Noël qui approche, du fils de 35 ans qu’il faudra bien marier (!), d’une vache qui vêle…

Des petits riens du quotidien, traduits sur une feuille à disposition du public qui maîtrise mal l’occitan…

Rendez-vous à la Palairie de GoutrensLe musée "Nos campagnes autrefois" est situé près de Goutrens, sur la route de Clairvaux. Il est ouvert tous les jours jusqu’à fin août de 14 heures à 19 heures, les week-ends et fériés en avril-mai et septembre-octobre et le reste de l’année sur demande pour les groupes.Tarif : 5 €, gratuit pour les enfants et scolaires, tarif réduit pour les groupes.Contact : 06 82 22 66 71.

Diverses mises en scène du musée / Photos DDM