Notre gastronomie en danger ?
Publié le 09/01/2021 à 05:21 | La Dépêche du Midi | L'édito de Sébastien Marti
Cauchemar en cuisine
Restaurants fermés : « Nous avons besoin d’un appui financier et surtout de visibilité », estime Gilles Goujon / Photo DDM
Ils avaient beau s’y attendre, ils ne peuvent être que déçus : les restaurateurs ne rouvriront pas, malgré le cap fixé par le gouvernement lors du dernier déconfinement, le 20 janvier prochain. Ils paient le prix, bien malgré eux, de la dégradation des indicateurs sanitaires au sortir des fêtes de fin d’année. C’est une douche froide et tous ceux qui font vivre la gastronomie française, de l’étoilé jusqu’à la cantine de quartier, peuvent légitimement nourrir du ressentiment à l’endroit de ceux qui leur ont tenu un double langage. Pourquoi, alors qu’il était évident que l’épidémie allait rebondir à la faveur des rassemblements familiaux de Noël, s’être engagé sur une date ?
Gastronomie : le croq’Michel au menu de la famille Sarran / DDM, Adrien Nowak
Les restaurateurs, comme les professionnels de la culture avant eux, ont besoin de perspectives claires afin de pouvoir redémarrer. C’est du reste l’ordinaire de ceux qui font la cuisine : on ne prépare pas à 12 h 30 le plat du client qui arrive à table une heure plus tard. Plus que toute autre profession, la restauration a besoin d’organisation. Et d’un large plan de relance. Car dans quelques semaines, lorsque les établissements en faillite tomberont comme une succession macabre de dominos, l’addition risque d’être lourde. Et indigeste pour une économie française qui vit de son patrimoine gastronomique, de ses patrons et de ses milliers de salariés.
Carcassonne. Le couvre-feu, un obstacle de plus pour les adeptes du drive / DDM, Claude Boyer
Comme Molière disait qu’il faut manger pour vivre et non pas vivre pour manger, il va vite falloir manger pour faire vivre les restaurateurs. Quand ? Plus personne ne se risque à avancer une date. Le calendrier de réouverture fait d’ailleurs l’objet d’un bras de fer discret entre le ministère de l’Economie et celui de la Santé, ce dernier ayant toujours tendance à considérer qu’aucune restriction n’est jamais assez forte pour endiguer une épidémie.
Aureville : Franck Renimel dans son restaurant En Marge (photo avant confinement) / DDM
Pris en tenailles entre deux ministres, cuisinés à l’étouffée, nos grands et petits chefs serrent les dents. Ils ont démontré, jusqu’ici, leur courage, leur patience et leur étonnante capacité d’adaptation, se réinventant complètement pour survivre grâce à la vente à emporter. Et encore, plus après l’heure du couvre-feu, sinon en livraison – mais qui peut livrer en dehors des grandes villes et des plateformes de type Deliveroo ou Uber Eats ?
Quand le chef Vincent Casassus joue les cantiniers à Auch / DDM
En attendant une réouverture qui surviendra comme l’hirondelle faisant le printemps, le pays devra solidairement se porter au chevet d’une profession à l’agonie. Il n’est pas acceptable que ces artisans se plient aux restrictions sanitaires sans que leur banquier, leur assureur, leur propriétaire ou tout autre créancier ne fassent à leur tour un geste et acceptent le report, voire l’annulation de certaines charges. La tablée est suffisamment grande pour y convier tout le monde…
Publié le 09/01/2021 à 06:41 | La Dépêche du Midi | Val. C.
Covid-19 : les restaurants au bord de la crise de nerfs
La restauration très impactée par les conséquences des mesures sanitaires / Photo DDM
La restauration figure parmi les secteurs les plus touchés par les conséquences des mesures sanitaires mises en place pour lutter contre le Covid-19. Jeudi soir, le Premier ministre ne leur a guère laissé l’espoir d’un avenir meilleur à court terme : "Il ne faudra pas envisager de réouverture avant la mi-février", leur a-t-il annoncé. Les professionnels s’impatientent.
Mois après mois, conseils de sécurité après conférences de presse gouvernementales, les restaurateurs en ont pris leur parti : ils n’en ont pas encore fini avec le coronavirus et son cortège de contraintes, de restrictions, et surtout de fermetures imposées.
Carcassonne : ouverte trop tard, la brasserie La Maison se retrouve sans aides de l'Etat / Photo DDM, Nathalie Amen-Vals
Beaucoup, malgré d’authentiques difficultés, jusqu’au dépôt de bilan, encaissent encore le choc, grâce aux efforts et aux aides déployés par le gouvernement. Au moins pour le moment. Car ils s’impatientent.
Si, jeudi soir, la plupart ne sont pas tombés de leur comptoir quand le Premier ministre a annoncé que la réouverture de leurs établissements ne se ferait pas le 20 janvier, ils ont tout de même grincé des dents lorsque Jean Castex a prévenu qu’elle n’était pas envisageable avant "la mi-février, a minima".
Calmont. Avec Cindy, le restaurant s’invite chez vous / DDM
Alors quand ? "Ce qui nous manque le plus, c’est de la visibilité, qu’on pose des jalons et qu’on s’y tienne, peste Hubert de Faletans, responsable de la branche restauration au sein de l’Union des métiers et des industries hôtelières (UMIH) 31. Qu’on nous dise par exemple : vous allez rouvrir le 1er avril parce qu’à cette période, on aura vacciné tant de personnes, et de notre côté, on pourra s’organiser, reprendre les embauches, pour être prêts en temps voulu".
Seules 45 000 personnes avaient été vaccinées en France au 7 janvier, dix fois moins que nos voisins italiens ou allemands, une lenteur très critiquée, a fortiori par les restaurateurs qui voient dans la vaccination la seule porte de sortie à cette interminable crise.
Montauban. Réouverture reportée : les restaurateurs montalbanais inquiets / DDM, Thomas André
"C’est extrêmement angoissant, les professionnels auront été fermés huit mois minimum, sur un an, et on ne voit pas de perspectives : certains sont en train de craquer, à la limite du désespoir", s’alarme Didier Chenet, président du GNI, le syndicat patronal des indépendants de l’hôtellerie-restauration. "Toutes les études que nous avons faites montrent qu’entre 20 et 30 % des établissements sont menacés" a-t-il rappelé sur France Info.
Sur cette seule deuxième vague, les restaurants sont fermés depuis le 30 octobre – seule une activité résiduelle de vente à emporter leur est permise –, mais depuis la mise en place du couvre-feu, même ce pis-aller s’est vu réduit, puisqu’on ne peut plus circuler après 20 heures, voire 18 heures dans l’est du pays.
"On ne pensait pas démarrer 2021 avec autant d'incertitudes", selon le syndicat de la restauration du Gers / DDM, Sébastien Lapeyrère
Face au marasme en cours, le Premier ministre a bien tenté de rassurer, en répétant que "le gouvernement continuera à soutenir économiquement l’ensemble des secteurs et des acteurs". Toutes les aides en cours sont ainsi maintenues, dont le chômage partiel ou le Fonds de solidarité, et de nouvelles mesures de soutien sont attendues.
Cela sera-t-il suffisant ? Surtout, que se passera-t-il lorsque la situation reviendra à la normale, que l’on commencera à rembourser les Prêts garantis par l’Etat (PGE), qu’il faudra solder les comptes ? "Je crains le pire, en mars, lorsqu’arriveront les bilans comptables annuels", sourcille Hubert de Faletans, qui s’émeut aussi pour les "laissés-pour-compte", ces professionnels affiliés à la restauration, comme les traiteurs, passés sous le radar des aides. Au nom de l’UMIH, il réclame des mesures significatives, notamment un vrai effort partagé sur les loyers, entre le bailleur, l’état et le locataire, mais aussi une négociation avec les banques, sur les taux d’intérêt des PGE. "Bien sûr, c’est coûteux, mais on n’est pas fautifs de la situation !"
Le responsable syndical voit enfin poindre une conséquence plus insidieuse, mais plus dangereuse, à ce très long hiver de la restauration : celui d’un changement de comportement des consommateurs, désormais habitués à se faire livrer. Ce serait alors le coup de grâce.
Les restaurateurs ne pourront pas rouvrir le 20 janvier comme prévu / DDM, Sébastien Lapeyrère
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