Un mois de mai catastrophique

6/6/2018

Publié le 05/06/2018 à 09:59   | La Dépêche du Midi |  Manon Adoue et Anaïs Mustière

Météo : le mois de mai a battu tous les records


En mai, record d'orages, d'impacts de foudre et d'éclairs / Photo DDM, Valentine Chapuis

Risques d'inondation et d'orages, pluies diluviennes, maisons submergées… Le mois de mai a battu tous les records : celui du nombre d'orages, d'impacts de foudre et d'éclairs. Et le pays n'en a visiblement pas fini avec ces phénomènes : les orages devraient durer au moins jusqu'à ce week-end.

La pluie n'en finit pas de tomber et les orages de gronder. Le mois de mai a été disons-le, catastrophique. Dimanche, les averses tombées à Morlaix dans le Finistère, ont nécessité 250 interventions des secours, l'eau ayant submergé maisons et commerces. Il y est tombé un mois de pluie en une demi-heure. Dans la région, le week-end a aussi été compliqué. Dans les Hautes-Pyrénées, un orage accompagné de grêle a entraîné de nombreux dégâts : des maisons inondées, des glissements de terrain, une habitation foudroyée… Mercredi dernier, c'est Espalion en Aveyron qui essuyait plusieurs torrents de boue. Le mois de mai rafle décidément tous les records.


Samedi et dimanche, de violents orages se sont abattus sur les Hautes-Pyrénées / Photo FB, Météo 65

D'abord celui du nombre d'impacts de foudre : 182 000 impacts ont été relevés au sol, doublant quasiment le précédent record de mai 2009. Ensuite celui de la pluie : le taux de pluviométrie est 11 % supplémentaires à celui d'un mois de mai moyen.Il est ainsi tombé 112 millimètres d'eau sur la zone Toulouse-Blagnac en un mois, un niveau largement supérieur à la moyenne de saison, située à 74 millimètres.

L'abondance de neige, puis sa fonte, ont même rendu la situation encore plus exceptionnelle puisque le niveau des nappes phréatiques de la Garonne est désormais excédentaire, a contrario des autres années. Ce phénomène, accentué par les précipitations abondantes, pousse les spécialistes à placer beaucoup de cours d'eau sous vigilance.



586 000 éclairs en un mois

Enfin, celui qu'on croyait être le «si joli mois de mai», décroche aussi le record du nombre d'éclairs. Keraunos, l'observatoire français des orages violents, en recense 586 000 en un mois sur toute la France. Mai a connu trente jours d'orages dont vingt d'intensité assez forte ce qui en fait le mois le plus orageux depuis dix ans en termes d'intensité et d'étendue des orages. La faute à «une situation de blocage» selon Etienne Kapikian, ingénieur à Météo France. «De hautes pressions sont accrochées sur le nord de l'Europe et de basses pressions sur le sud, du côté de la péninsule ibérique», décrit-il, écartant tout rapport avec le réchauffement climatique.

Ajoutons à cela, un mois de mai peu servi côté ensoleillement avec notamment huit jours en moins de soleil. Un tableau bien sombre d'un mois normalement considéré comme la porte d'entrée de l'été. Mais juillet s'annonce, toute mesure gardée, beau et chaud. Août pourrait être plus frais et plus humide. Avant ça, la France devrait connaître de nouveaux épisodes orageux toute la semaine.


Publié le 05/06/2018 à 07:43  | La Dépêche du Midi |  S.Mc

Grand Sud : un tiers de pluie en plus qu'un mois de mai normal


Nombreuses inondations dans le Lot-et-Garonne./ Photo DDM Jean-Michel Mazet

Nous n'en avons pas fini avec les orages et les fortes précipitations dans la région. Pour Etienne Kapikian, ingénieur à Météo France, ce qui est le plus remarquable, ce n'est pas tant la violence de ces orages que leur nombre, leur répétition et leur étendue. Quelque 180 000 impacts de foudre ont été enregistrés en métropole, soit 50 % de plus qu'en mai 2009. Dans le Grand Sud, le Lot-et-Garonne, le Gers et les Hautes-Pyrénées ont été particulièrement concernés par les alertes aux orages ce week-end. 

Dans les Hautes-Pyrénées, les fortes précipitations, parfois accompagnées de grêle, ont causé, samedi soir et dimanche, des dégâts et inondations à Bénac où les pompiers, qui ont enregistré une quarantaine d'interventions sur le département, procédaient encore dimanche soir aux derniers nettoyages de maisons inondées. La mairie et l'école de ce village situé entre Tarbes et Lourdes ont aussi fait les frais de toute cette eau.


Vingt et une maisons sous les eaux à Roquefeuil (Aude) / Photo DDM

Moins de soleil à Toulouse qu'à Lille
Hier, plusieurs routes départementales étaient encore coupées à la circulation. La nationale 21, fermée entre Tarbes et Lourdes en raison de très fortes précipitations a pu, elle, rouvrir hier.

C'est surtout dans le secteur de la commune d'Adé que ces pluies ont été les plus fortes dimanche en fin de journée, où elles ont provoqué des inondations sur les routes et dans les maisons. «La voirie communale a beaucoup souffert également, avec plusieurs revêtements de rues qui ont été endommagés par le ruissellement et des chemins ruraux dans un état catastrophique» constatait dimanche Georges Astugue, le maire.


De gros dégâts localisés, dans le Gers, après les orages / PHoto DDM

En Haute-Garonne, où de nombreuses averses de grêle se sont produites samedi, le Ger et le Salat menacent toujours de sortir de leur lit dans plusieurs communes.
Dimanche, Météo France a relevé en une heure, 49 mm d'eau à Espoey (Pyrénées-Atlantiques), 30 mm à Agen et 24 mm à Brive.

Prévisionniste à Météo France, Emmanuel Demaël confirme que mai a été particulièrement déprimant : «Ce fut un mois bien plus pluvieux que la normale en ex-Midi-Pyrénées, de l'ordre de 32 % de précipitations de plus. Et associé à un ensoleillement déficitaire de 20 % environ.» Une fois n'est pas coutume, il y a eu moins de soleil à Toulouse en mai qu'à Rennes ou Lille ! Les températures, elles, sont restées proches des normales de saison.


Publié le 05/06/2018 à 07:42  | La Dépêche du Midi |  Propos recueillis par Manon Adoue

 «On va vers des phénomènes météo de plus en plus intenses»


Pascal Boureau, prévisionniste chez Météo France / Photo DDM

Le printemps a été particulièrement pluvieux et froid, est-ce normal ?
Le taux de précipitations a été très élevé sur la région : 30 à 40 % de plus que la normale. Sur Toulouse et sa banlieue, on est même à plus 50 % de précipitations que la normale. Le piémont des Pyrénées a reçu 110 litres d'eau au m2, la banlieue toulousaine 200 litres au m2 , c'est deux fois plus que les valeurs normales. Le phénomène s'explique par une dépression venant de l'Islande qui s'est isolée en Espagne, un anticyclone présent sur le nord de la France et l'Europe a bloqué toutes les perturbations.

A-t-on battu des records de pluviométrie ? De températures ?
Malgré ce qu'on pourrait penser, les températures sont restées dans la moyenne, elles affichaient -0,5 % en milieu de journée par rapport aux normales saisonnières. Le plus frappant c'est l'écart de température : il faisait 25 °C à Toulouse le 11 mai, 14 °C le lendemain. En revanche, nous avons battu un record le 14 mai à Luchon où il faisait 9 °C. Il n'avait pas fait aussi froid ce même jour depuis 1947. La commune n'est pas loin du record absolu de pluviométrie : au mois de mai 200 litres d'eau sont tombés au m2. Le dernier record remonte à 225 litres d'eau au m2 en 1977.


Avec les orages, l'eau envahit un village des Baronnies / Photo DDM, JPH

Tant d'orages au mois de mai, ce n'est pas si habituel…
Si les orages les plus violents ont lieu en août, mai reste un mois à orages. Toulouse compte sept jours d'orages au mois de mai alors que la moyenne est de cinq, on est peu au-dessus de la normale. Rappelons-nous qu'en mai 2008, la Ville Rrose était déjà sous 10 cm de grêle.

Que dire de l'ensoleillement ?
Que le printemps a été bien vilain. 160 heures d'ensoleillement en Haute-Garonne contre 210 heures normalement, ce sont 50 heures de déficit soit environ huit jours de soleil en moins au mois de mai.


Orages : quinze communes gersoises vont demander le classement en catastrophe naturelle / Photo DDM

Comment s'annonce l'été ?
Juin risque d'être instable. Pour la suite, dur de dire encore, le calcul des prévisions saisonnières n'est pas assez net. Ce que l'on sait, c'est qu'un blocage d'air chaud sera présent en Europe centrale et en Russie à partir de la mi-juin, autant dire que les joueurs de football vont transpirer en Russie pour la Coupe du monde.

Doit-on s'attendre à des phénomènes de plus en plus violents ?
Ils seront de plus en plus intenses mais pas forcément plus fréquents. La Terre se réchauffe et l'énergie produite à la surface décuple l'ampleur des phénomènes météorologiques. Dans l'Aveyron, il vient de tomber 70 litres d'eau au m2 en seulement 2 heures et demie. À Tournefeuille mercredi c'était 36 litres d'eau au m2 en une heure et quart. On voit bien que les valeurs progressent en peu de temps, jusqu'à atteindre quasiment le niveau des pluies tropicales. Et en ce qui concerne les températures, les disparités vont aller en se creusant de plus en plus.


Éboulements dans les Hautes-Pyrénées / Photo FB, Météo 65
 

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