Fusillade à Charlie Hebdo - Hommage

8/1/2015

Publié le 08/01/2015 à 07:56  | La Dépêche du Midi |  R.M.

Le musée Lafage de Lisle-sur-Tarn sous le choc

En 2011, le musée Raymond-Lafage avait proposé une  formidable exposition avec les 1000 unes de Charlie Hebdo. / Photo DDM, J.M. Lamboley

La nouvelle de l'attentat dont a été victime, hier, la rédaction de Charlie Hebdo a particulièrement choqué à Lisle-sur-Tarn qui a reçu les dessinateurs pendant quatre ans.
À Lisle plus qu'ailleurs, l'attentat qui a frappé la rédaction de Charlie Hebdo, hier matin, a particulièrement touché les habitants. Pendant quatre ans, de 2008 à 2012, les Lislois ont eu l'occasion de les approcher mais surtout d'échanger avec eux, en toute simplicité, au détour d'une des quatre expositions des dessins de Charlie Hebdo, au musée Lafage. Car à Lisle-sur-Tarn, ils étaient un peu comme à la maison. Et hier, les habitants disaient leur fierté de les avoir accueillis. Mais aussi «l'horreur», «la catastrophe» en apprenant la nouvelle.

Jean Tkaczuk croqué par les dessinateurs ( ici Tignous) de Charlie Hebdo (juin2011). /Photo DDM

De la mairie tenue à l'époque par leur ami Jean Tkaczuk jusqu'au musée sans oublier les bonnes tables du secteur, Wolinski, Charb, Cabu, Tignous et d'autres avaient plaisir à venir ou revenir à Lisle. Beaucoup de Lislois ont gardé chez eux, le souvenir d'une dédicace, d'un dessin sur un coin de table juste pour faire plaisir. «Ici, Charb disait qu'on parlait vrai», se remémore Anne-Marie Carrassus, la directrice du musée. Elle ne peut retenir ses larmes. Cette histoire d'amitié entre la rédaction de Charlie et la ville, Anne-Marie Carrassus en est une des chevilles ouvrières. 


Cabu et Wolinski, présents à Lisle pour l'inauguration de l'exposition consacrée à Cabu ont dessiné à quatre mains.(juin 2009) / Photo DDM, Emilie Cayre

Elle et sa famille avaient tissé des liens très forts avec chacun d'eux. La veille de l'attentat, elle avait encore le directeur de la rédaction au téléphone. Charb qui, chaque fois, lui lançait, au moment de prendre l'avion du retour : «Je ne veux pas partir». Elle se souvient encore de la gentillesse et de la simplicité de Cabu. Le dessinateur qui faisait attendre tout le monde parce qu'il terminait un dessin promis à un gamin dans la cour du musée. « Le plus pur d'entre nous, disait de lui Wolinski. J'espère que l'esprit de Charlie survivra à une telle tuerie. C'est mon vœu le plus cher.».

«Pour seule arme leurs crayons»

Robert Plageoles / Photo DDM

C'est avec des sanglots dans la voix que le vigneron Robert Plageoles témoigne. «Ces artistes n'étaient jamais sortis de Paris, ils ont accepté sans condition de donner ce qu'ils avaient comme dessins. Ils étaient heureux comme des enfants, ils prenaient contact avec une province qu'ils ne connaissaient pas. Je suis tellement ému que j'ai du mal à trouver des mots pour en parler. C'est un assassinat. Ils ont assassiné des pacifistes armés d'un crayon, des humanistes. Ils ont assassiné des hommes délicieux, conviviaux, curieux de tout. Ils ont assassiné un principe de journalisme qui est la liberté d'expression sous sa forme la plus artistique. Je me souviens de ces moments où je parlais patois à Georges Wolinski, il ne saisissait pas tous les mots alors je lui avais acheté le livre "A bisto de nas?" illustré par Jean-Claude Pertuzé. Ce livre lui avait tellement plu qu'il en avait fait une page entière dans Charlie Hebdo ! Chaque fois qu'ils revenaient dans notre coin, ils étaient comme des enfants qui reviennent en vacances. Tous ceux que je connaissais, aujourd'hui assassinés, me disaient, souvent, que nous habitions une région formidable. Je n'oublierai jamais ces dessinateurs qui avaient pour seule arme, leurs crayons.»


Publié le 08/01/2015 à 07:13  | La Dépêche du Midi |  Dominique Delpiroux

Cabu, Charb, Wolinski... : ils étaient nos amis

«La Dépêche du Midi» a eu l'occasion d'inviter les dessinateurs de Charlie Hebdo parmi sa rédaction toulousaine. Ici, Wiaz, Wolinski, Charb et Jul. / Photo DDM

Nous n'oublierons jamais ces moments précieux et drôles à la rédaction de La Dépêche du Midi. Avec Cabu, avec Charb, et à d'autres occasions, avec Wolinski. Nous n'oublierons jamais leurs mimiques, pendant nos conférences de rédaction, l'œil pétillant qui perçait sous la tignasse de Cabu, les sourires entendus de Charb. Nous n'oublierons jamais la magie qui glissait de derrière leurs lunettes jusqu'à leur main, qui domestiquait le crayon. Et en quelques traits, quelques mots, faisait naître le rire. Nous étions tellement heureux d'avoir ces légendes de la presse entre nos murs, ces géants de la caricature dans nos colonnes… Cabu en septembre 2009, Charb et Luz en novembre 2010, mais le reste de la bande, Riss, Tignous, et Jul depuis Paris, avait un œil sur nous, et nous envoyaient ses dessins…

Une vraie histoire d'amitié et de confraternité entre La Dépêche du Midi et l'équipe de l'hebdomadaire satirique. Un coup de cœur pour cette bande d'anars bourrés de talent et d'humanité.

Charlie Hebdo illustre La Dépêche du Midi - De gauche à droite : Hervé Monzat, journaliste, Eric Laffont, directeur des relations extérieures de La Dépêche du Midi, Yann Bouffin, rédacteur en chef, José Biosca, directeur général de La Dépêche, Charb, rédacteur en chef de Charlie Hebdo, Luz, dessinateur, Jean Tkackzuk, maire de Lisle-sur-Tarn (novembre 2010) / Photo DDM

Cette histoire entre notre journal et Charlie est née dans le Tarn, de la complicité de personnages hauts en couleur et généreux. Lucien Vanel, le célèbre restaurateur toulousain – qui fut lui aussi notre compagnon de route, comme chroniqueur à La Dépêche – et son complice le vigneron tarnais Robert Plageolles étaient amis avec celui qui à l'époque était le maire de Lisle-sur-Tarn, Jean Tkackzuk, qui raconte :

«Nous avions organisé des repas, et pour illustrer les invitations, Lucien Vanel m'a proposé de demander à «son ami Wolinski». Je n'osais pas y croire, mais il l'a fait. Et mieux encore, Wolinski a accepté d'être exposé dans notre petit musée Lafage, à Lisle ! Je n'en revenais pas qu'il puisse venir dans notre trou perdu. Je suis allé à Paris, et là, il m'a confié tout un tas de dessins, des originaux, des couvertures des tout premiers Hara-Kiri… J'étais stupéfait par tant de confiance et de gentillesse…»

Lisle sur Tarn : Charb au musée Raymond Lafage en compagnie de Jul. (octobre 2010)./ Photo DDM

À la suite de Wolinski, d'autres auteurs de Charlie Hebdo sont à leur tour, venus à Lisle-sur-Tarn.
«Cabu ? Une gentillesse totale. Et un immense dessinateur», assure Jean Tkackzuk, déchiré par la tristesse.

D'autres ont fait le voyage vers le Tarn, comme Charb, Luz ou Tignous.
«Et c'est par l'intermédiaire de Marie-France Baylet, présidente de la Fondation de La Dépêche du Midi, que nous avons eu l'idée de proposer à Cabu d'être l'invité de la rédaction.»
C'était le 25 septembre 2009. Cabu était venu en compagnie de Jean Tkackzuk et d'Anne-Marie Carassus, directrice du Musée Lafage.

Wiaz, Wolinski, Charb et Jul à Lisle sur tarn puis à La Dépêche en juin 2010 / Photo DDM

Il nous avait laissé trois dessins désopilants. Le célèbre Grand Duduche tentant de conter fleurette à la fille du proviseur en Ariège ou en train de parler du bac à 3 000 contre la méthode Assimil… Et enfin, un petit croquis avec un ours féroce sur un terrain de rugby. Commentaire : «Il remplace Kelleher !»

L'année suivante, ce sont Charb et Luz qui ont parsemé nos colonnes de leurs dessins féroces et drôles : Charb avait croqué un «marchand de sommeil»… qui prenait des somnifères !
Nous avions longuement interviewé Cabu. Toujours avec son sourire énigmatique de vieux matou prêt à griffer, il nous avait parlé des menaces de mort qu'il recevait. Le Grand Duduche lui, pourfendait la bêtise avec son crayon.

«J'aime la France» ... Georges Wolinski à côté du buste de Marianne dans la mairie de Lisle-sur-Tarn (juin 2010)./ Photo DDM, Jean-Marie Lamboley.


Hommage à Charlie Hebdo : importante mobilisation

Dans la région, à Toulouse (20.000 personnes), Albi, Castres, Agen, Rodez, Carcassonne ou encore Cahors, des centaines de personnes se sont retrouvées pour se recueillir.

Place du Capitole à Toulouse / Photo FB Ville de Toulouse

Place du Capitole à Toulouse / Photo FB Ville de Toulouse

Parvis des Droits de l'Homme à Bordeaux / Photo Sud-Ouest Guillaume Bonnaud


Marseille / Photo FB La Provence

Lyon / Photo FB Ville de Lyon

Clermont-Ferrand / Photo FB Ville de Clermont-Ferrand

Près de 1000 Agenais ont rendu hommage aux victimes de Charlie Hebdo / Photo DDM

600 personnes mobilisées à Carcassonne / Photo DDM Roger Garcia

Lire les articles du jour de La Dépêche du Midi concernant le drame
11h20 le 7 janvier : carnage à Charlie Hebdo
http://www.ladepeche.fr/article/2015/01/08/2024866-11-h-20-carnage-a-charlie-hebdo.html

 
 

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