Empreintes romaines en Narbonnaise
Empreintes romaines en Narbonnaise
Publié le 01/09/2024 | Midi Libre | Arnaud Boucomont
Il y a 2 000 ans, les Gaulois du Sud étaient colonisés par les Romains en douceur

Nîmes, ses remparts et ses monuments reconstitués par l'architecte et archéologue Jean-Claude Golvin.
Contrairement aux Gaulois aux cheveux longs, plus au nord, nos ancêtres méditerranéens n’ont pas vraiment résisté à un empire qui s’étendait. Ils ont vite adopté une vie à la romaine.
"La colonisation romaine n’a pas toujours été mal vécue, contrairement à ce qu’Astérix veut nous faire croire", sourit Romy Wyche, la directrice du musée Arles antique. Des Gaulois ont aidé Rome à Alésia. Ils n’étaient pas tous résistants, aux côtés de Vercingétorix. Dans le sud de la Gaule, en tout cas, le sang n’a pas vraiment coulé il y a un peu plus de 2000 ans. Pas irréductibles, ces Gaulois-là.

Arelate : La traditionnelle semaine consacrée à l'art de vivre gallo-romain / Prov, Eric Caterina
"Il n’y a pas eu de combats à Nîmes, résume une guide-conférencière du musée de la Romanité, Laurence Aubry. L’élite veut s’intégrer à la population romaine. Elle va se romaniser rapidement." On relativisera tout de même : les textes retrouvés, positifs, sont écrits pour valoriser l’apport du colonisateur.
La civilisation romaine arrive avec ses progrès, son eau potable, ses tuyauteries en plomb, son réseau routier rationalisé par Agrippa, bras droit de l’empereur Auguste. Le commerce maritime et fluvial est démultiplié. Dans le sud de la Gaule, on commence à cultiver, à l’italienne, l’olivier et le figuier. La vigne prend son essor.

La Via Domitia à Ambrussum. / ML
Des Italiens accélèrent la romanisation en s’y installant, à l’instar d’anciens militaires à qui on a donné des terres. On transforme les fermes gauloises en domaines ruraux pour la culture et l’élevage, les villae. On s’en fait encore aujourd’hui une idée précise en visitant la villa de Loupian, dans l’Hérault, et son site archéologique.
Une zone-tampon
Le sud de la Gaule devient province romaine. Jules César s’appuie sur cette base arrière pour orchestrer sa conquête du nord et à tout le moins s’en sert de zone-tampon pour ne pas être attaqué, depuis le nord, par ce que les Romains appellent "la Gaule chevelue" ou "Gaule aux longs cheveux".

A Loupian, la villa gallo-romaine révèle la vie des maîtres des lieux au 1er siècle de notre ère. / ML? Guillaume Gal
En même temps, la colonisation du sud permet de favoriser le transit et le commerce vers l’Espagne. Le nord a été plus marqué par six années de combats face à César. Il faut attendre la fin du Ier siècle avant Jésus-Christ pour qu’une réelle organisation politique soit mise en place par l’empereur Auguste, successeur de César.
Quatre provinces sont créées : l’Aquitaine, la Lyonnaise, la Belgique et… la Narbonnaise. Cette dernière, instituée en 121 avant J.-C, remonte le Rhône et s’arrête juste avant Lyon. Elle englobe quasiment tout le sud de la France.

Patrimoine du Bassin de Thau : la voie domitienne, l'A9 de l'époque / ML, Philippe Malric
La voie Domitienne, reliant l’Italie à l’Espagne, traverse cette province. Les Romains y créent une ville-carrefour et un port stratégique, Narbonne, à quatre kilomètres d’un oppida gaulois. La ville d’Orange, aussi, est bâtie de toutes pièces, pour assurer le prestige romain, avec son théâtre antique et son arc de triomphe.
Marseille, cité grecque, est la ville la plus importante du sud avant l’arrivée des Romains. César, dans sa guerre face à Pompée pour la conquête de Marseille, crée une colonie romaine à Arles et la ville prospère. Son port fluvio-maritime en fait une plaque tournante commerciale.

Plongée dans l'Antiquité au musée Narbo Via / ML, David Huguenin
La patte italienne
On calque sur les villes gallo-romaines la patte italienne : des rues rectilignes, des immeubles (appelés insulae). Les riches gallo-romains construisent des maisons confortables, les domus, en important les techniques de constructions italiennes avec pierres de taille, maçonnerie, fresques et mosaïques.
Les maisons modestes continuent à être bâties en bois et en torchis. Qu’ils soient puissants ou misérables, les Gallo-Romains partagent une même contrainte : les maisons ou appartements ont peu d’ouvertures, pour éviter de faire entrer le froid. Des toiles huilées ou cirées font office de vitres.

Les Augustales plongent Loupian à l’heure antique / ML, Valentine Graff
Dans les valises des Romains, aussi, leurs monuments… Thermes, théâtres, amphithéâtres, cirques, arènes et arcs de triomphe voient le jour. Des forums mêlent espaces politique, commercial et religieux. Les temples, en leur sein, étaient voués au culte impérial. La Maison Carrée, à Nîmes, est le seul temple gallo-romain complètement préservé.

La Maison Carrée de Nîmes à l'Unesco / ML, Mickaël Anisset
Le faste nîmois
À Nîmes, l’urbanisme de la ville est profondément transformé pour correspondre aux modèles romains. Un programme d’architecture publique monumentale est initié sous Auguste, avec l’édification de l’Augusteum et du forum.
Les remparts nîmois étaient moins réellement défensifs (construits en temps de paix) que faits pour assurer le prestige de l’empereur.

Le Pont du Gard, un formidable joyau d’histoire et de culture / ML, Aurelio Rodriguez
On doit à Claude, quatrième empereur romain, l’aqueduc et le Pont du Gard pour alimenter Nîmes en eau.
La ville de Nîmes rétrécit à la fin du troisième siècle, à l’image du déclin généralisé dans le reste de la région, à l’exception d’Arles. Au Ve siècle, l’Empire romain s’effondre. Les Barbares occupent presque toute la Gaule. Les Francs fondent leur royaume. Mais l’héritage romain est toujours là 2 000 ans après, sous nos yeux.

Dans les arènes, les jeux romains rythmaient les loisirs. / ML, ARNAUD BOUCOMONT
Arènes et théâtres : la mode des spectacles
Panem et circenses. Du pain et des jeux du cirque. La formule, qui raille un peuple abusé par les empereurs, s’est aussi répandue en Gaule romaine. "Les gladiateurs étaient des stars, nos footballeurs d’aujourd’hui", résume Romy Wyche, directrice du musée Arles antique. Des figurines les représentaient.
On décorait les lampes à huile avec des médaillons comprenant des scènes de chasse, de combats de gladiateurs, de courses de char, de masques de théâtre, de danseurs et musiciens… "C’était des goodies comme on en achète aujourd’hui", sourit la guide nîmoise Laurence Aubry.

Grands jeux romains aux arènes de Nîmes / ML, Yannick Pons
On se fait l’image de combats ultra-sanglants, "mais c’est avant tout un spectacle, ce n’est pas automatiquement la mort de l’adversaire", insiste Lucile Novellini, du musée de la romanité à Nîmes. "L’organisateur des jeux prenait tout à sa charge donc c’est peu probable qu’il y ait eu des tigres dans la région. Il y avait plutôt des sangliers, des ours, des loups."
On reste toute la journée aux arènes, celles de Nîmes ou d’Arles : le matin pour des chasses, appelées venationes, à midi pour des spectacles comiques et l’après-midi pour les combats de gladiateurs.
La chasse est réservée à une élite, y compris dans la nature. L’animal le plus prestigieux à chasser est le sanglier : il peut attaquer, une lutte peut s’engager au corps à corps avec une lance et les flèches dont du mal à pénétrer sa peau épaisse.

Balade dans l'Antiquité romaine : Orange, un théâtre unique en Occident / Prov, L.GL.
Les Gallo-Romains les chassent dans la nature avec des chevaux pour fatiguer les animaux, l’ancêtre de la chasse à courre : les animaux accumulaient des toxines dans les muscles et finissaient tétanisés.
Le cirque d’Arles Arles possédait un cirque (dont il ne reste que quelques ruines en contrebas du musée Arles antique) dans lequel étaient organisées des courses de chevaux et de chars. Les théâtres accueillaient des spectacles culturels.

César, le Rhône pour mémoire : 20 ans de fouilles dans le fleuve / LD
Dans la niche centrale du mur de scène de celui d’Arles est placée la statue de l’empereur Auguste. Les spectateurs sont assis selon leur rang social. Seuls les hommes peuvent être acteurs. Ils portent des masques pour caractériser les personnages qu’ils interprètent. Au rayon des loisirs, citons aussi les jeux plus modestes, très répandus : dés, jeux d’osselets, noix utilisées comme billes.
Les sports de balle sont recommandés : le gage d’un esprit sain dans un corps sain, même si les règles du jeu ne sont pas parvenues jusqu’à nous.

Le musée Narbo Via / Ind, Christophe Barreau

L’antique ville de Narbonne / ML

Balade dans l'antiquité romaine : Le site archéologique de Glanum, à la source de l'Antiquité / Prov, L.Gl.
L'article complet de Midi Libre >
https://www.midilibre.fr/2024/09/01/il-y-a-2-000-ans-les-gaulois-du-sud-pas-vraiment-des-asterix-etaient-colonises-par-les-romains-en-douceur-12165563.php

Carte de la Narbonnaise romaine / sladeplayer
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