Présidentielles 2022 : Focus sur Graulhet
Publié le 20/03/2022 à 09:04 | La Dépêche du Midi | Richard Bornia
À Graulhet, en pleine reconquête, le PS et LREM font bon ménage
Le maire, Blaise Aznar, en grande conversation avec la ministre du Logement, Emmanuelle Wargon, lors de sa visite à Graulhet, la semaine dernière. / DDM Marie-Pierre Volle
Après quelques décennies de déprime, la cité du cuir retrouve de sa superbe. Graulhet rejoue dans la cour des grands et voit défiler les ministres. Au risque de faire grincer quelques dents dans les rangs socialistes.
Serviteurs de l’Etat et ministres se bousculent désormais au portillon, dans cette ville dirigée par la gauche depuis 14 ans. Dans les médias, les faits divers ont été supplantés par les projets, les réalisations et les annonces d’installation de nouvelles entreprises.
Une ville tout en contraste. Le soir, vous pouvez dîner au restaurant "Côté Place" avec comme voisin de table Donald Potard, directeur pendant 15 ans de la marque de luxe Gauthier Création venu faire du business, après avoir englouti le midi un sandwich à "L’Istambul Kébab".
Les ministres De Montchalin et Attal dans les commerces graulhétois
Graulhet a vécu des années de galère, avec la fermeture notamment de très nombreuses mégisseries victimes de la crise dans les années 80. Le pain noir, ici, on connaît. Des friches industrielles, plus de 100, donnent à la ville un sentiment d’abandon. Rien n’est encore gagné, mais petit à petit, la ville grignote le terrain perdu.
Côté élus, le premier d’entre eux, Blaise Aznar, maire PS, se définit comme le capitaine d’une équipe plurielle : "je suis à la tête d’une majorité citoyenne", dit-il. Plurielle, citoyenne, des adjectifs qui fleurent bon le temps jadis, la période Jospin où la gauche se targuait de changer la vie des gens. "Je suis socialiste !", ne cesse de répéter, haut et fort, le maire.
Seulement, Graulhet est devenue la ville "place to be" de la Macronie. Gabriel Attal, Amélie de Montchalin, Nadia Hai… autant de membres du gouvernement Castex qui sont venus l’an dernier en terre graulhétoise. Olivier Veran, ministre de la santé a fait également le déplacement à l’automne pour soutenir les efforts de la ville pour son hôpital, sa maison de retraite et pour faire reculer le désert médical. Il y a quelques jours, Emmanuelle Wargon, ministre du logement était en visite à l’îlot du Gouch et à la friche Bourdariès pour apporter le soutien de l’Etat à la réhabilitation de ce quartier populaire.
Olivier Véran, ministre des Solidarités et de la Santé, dans le Tarn : Pour l’hôpital de Graulhet, il a annoncé plus de consultations médicales et la réimplantation de l’imagerie médicale. / DDM, Marie-Pierre VOLLE
À chaque fois, ils ont sorti le chéquier. En janvier, c’est le Recteur de l’académie de Toulouse qui s’est engagé pour que la ville ait enfin un lycée d’enseignement général. Le Préfet du Tarn se rend très régulièrement dans la Cité du cuir. "J’ai compris que l’Etat devait s’occuper de Graulhet, et montrer de manière exemplaire un avant et un après", soulignait, le 2 février dernier, l’ancienne Préfete Catherine Ferrier.
Les caciques départementaux du PS s’inquiètent, à mots de moins en moins couverts, de ce flirt un peu trop visible entre le pouvoir en place et la seule grande ville socialiste du Tarn. Mais, Blaise Aznar est formel : "Pour Graulhet, je ne m’interdis rien et j’ose tout. Ce qui m’importe c’est le résultat. Je ne suis ni sectaire, ni dogmatique, simplement républicain".
À Graulhet coule le Dadou, la droite aussi, guère présente dans l’échiquier politique graulhétois. En conseil municipal, autour du maire, on retrouve Claire Fita, une des vice-présidentes PS de la région Occitanie, Florence Belou vice-présidente PS du Conseil Départemental et présidente de Tarn Habitat, tous les 3 ont parrainé Anne Hidalgo.
Nadia Hai, ministre déléguée chargée de la ville a rencontré des jeunes graulhétois bénéficiaires d’actions au titre de la politique de la ville. Photo DDM, Emilie Cayre.
Le chef de file de l’opposition, Julien Bacou est à la fois conseiller municipal et régional RN, candidat Rassemblement National aux prochaines élections législatives. Sans surprise il a parrainé Marine Le Pen : "Elle va gagner la primaire à droite", pronostique-t-il.
LREM, absent de l’assemblée communale est bien un des acteurs de l’actualité graulhétoise avec la députée LREM Marie Christine Verdier Jouclas, omniprésente sur le terrain. Elle se démène avec la municipalité pour faire avancer les projets. "Ce qui m’importe c’est de faire bouger les choses", affirme-t-elle. Des propos que l’on pourrait mettre dans la bouche de Blaise Aznar.
Santé, éducation, insertion, économie : les dossiers importants sont actuellement ouverts. Il y a des déceptions. Le dispositif "territoire Zéro chômeurs de longue durée" patine : le conseil départemental se fait tirer l’oreille pour mettre la main au portefeuille. Si l’optimisme est de rigueur avec une démographie en hausse, des points noirs subsistent : un chômage au-dessus de la moyenne nationale, au cœur du centre-ville une place du Jourdain qui ne ressemble à rien et des friches qui bouchent toujours l’horizon. "Je me bats pour changer l’image de la ville et nous y arriverons", assure Blaise Aznar. Qui a besoin de Paris pour y parvenir.
Réhabilitation de friches : L’usine Bourdariès fait partie des cinq projets retenus. / DDM
UN NOUVEAU RENDEZ-VOUS
La Dépêche du Midi a lancé un nouveau rendez-vous "Au cœur de la campagne" pour prendre la température de notre territoire, à moins d’un moins du premier tour de l’élection présidentielle.
Après Gaillac mercredi, Castres hier et Graulhet, aujourd’hui, nous nous rendrons, au cours des trois prochaines semaines, dans plusieurs communes du département pour vous donner la parole, recueillir vos attentes, vos priorités, vos coups de gueule, à l’occasion de ce rendez-vous majeur de la vie politique.
Publié le 20/03/2022 à 09:04 | La Dépêche du Midi | G.D.
Sur le marché de Graulhet, on réclame plus de pouvoir d’achat
Au pied des deux clochers de l’église Notre Dame, au marché du jeudi, chacun prêche pour sa paroisse / DDM G.D.
Sur le marché du jeudi comme sur celui du dimanche, on trouve beaucoup de retraités. À Graulhet, comme partout, on parle de la guerre et du prix de l’essence.
Et quand la discussion tourne vers les prochaines élections nationales, les attentes sont partagées entre le pouvoir d’achat qui se rétrécit comme une peau mal mégissée et les revendications propres aux situations de chacune et de chacun.
Alain et Sylvie, la soixantaine sont des habitués des étals et des commerces de la place. "D’abord la sécurité. Et puis l’Etat devrait remédier à ces déserts médicaux qui s’agrandissent et se banalisent. Trois mois minimum pour un rendez-vous chez un spécialiste. Il vaut mieux n’avoir rien de grave !"
Pas loin, Noël, agriculteur retraité qui vit toujours sur l’exploitation familiale, peste contre ces prix du gasoil ou des engrais qui augmentent plus vite que son modeste train de vie. "On n’a plus assez pour vivre. Il faut aussi augmenter les retraites des paysans !".
Petites villes : un fonds pour revitaliser les commerces / DDM
Dans son camion frigo, Patrick le boucher chevalin, 53 ans, craint surtout pour sa profession. "Nos politiques sont loin de la réalité, de nos préoccupations. Les conditions de travail sont de plus en plus compliquées et la motivation chez les jeunes pour apprendre le métier est moindre. Nous avons trop de paramètres à gérer, de contraintes administratives à maîtriser. Pour moi, par exemple, le souci c’est l’approvisionnement. Et que dire dans l‘aberration quand je dois aller faire abattre mes chevaux à Pamiers alors que j’ai l’abattoir de Puylaurens à deux pas de chez moi !"
Plus loin, c’est Patricia, 48 ans, productrice, qui questionne. "Qui peut nous arracher du bourbier dans lequel on est surtout de cette situation internationale qui préoccupe ? Financièrement, tout augmente, le climat se dérègle. Que vont faire nos enfants ?".
Pierre, artisan, 52ans, voudrait favoriser la passation de savoir. "Donner la possibilité à des entreprises, de récupérer le savoir-faire des anciens plutôt que de le laisser se perdre". En réflexion devant un étalage de primeurs, Benoît, chômeur, 44 ans, est devenu fataliste. "J’ai du mal. On vit dans un beau pays, mais c’est le chacun pour soi qui règne désormais. Nos dirigeants ont toute une société à rassurer et à refaire !".
Graulhet : Dispositif "Opéra" pour briser le cercle de l’échec / DDM
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