Fêtes : Les plaisirs de la table

23/12/2016

Publié le 18/12/2016 à 08:12   | La Dépêche du Midi |   Sébastien Dubos

Les plaisirs de la table


Les chefs des Tables du Lys bigourdan présentent leur menu des fêtes/ Photo DDM, Sophie Loncan.

Les repas de fêtes, que ce soit le réveillon de Noël ou celui de la Saint Sylvestre, ont pris une place à part dans notre vie. Et depuis des années, l'engouement des Français pour la cuisine ne se dément pas. Alors cuisiniers chevronnés ou novices, cette semaine sera la vôtre. Sur les marchés, en ville ou à la campagne, vous serez des milliers à chercher le bon produit, celui qui fera la différence ou celui qui vous rappellera de bons souvenirs. Vous aurez le choix : il y a les recettes traditionnelles mais il y a de plus en plus les chemins de traverse, explorés par les chefs étoilés qui misent tous sur la notion de «cuisine plaisir».

Bien sûr, il y a les volailles, et au premier rang la dinde. Mais, avec un peu d'imagination et quelques ingrédients supplémentaires, le terroir de notre région offre quelques pièces, qui, une fois cuisinées feront un sacré effet sur votre table.

L'essentiel reste la convivialité et c'est le maître mot du chef agenais Éric Mariotta : pas besoin de produits de luxe pour réussir un repas de fêtes. L'amour mis dans la préparation des plats et dans le dressage de la table des fêtes sera le commencement d'un rituel chaque année renouvelé mais qui chaque année garde, par son imprégnation dans nos mémoires et dans nos papilles, ce pouvoir magique.


Gourmandises entre Occitanie et Nouvelle Aquitaine


Eric Mariottat, Chef une étoile, restaurant Mariottat à Agen (47) / Photo DDM, Jean-Michel Mazet

Quel est le principal atout culinaire de votre région ?
Laurent Lemal et Eric Mariottat, tous deux une étoile au Guide Michelin, vouent un culte sans limite aux produits qu'ils vont cuisiner, qu'ils soient en Nouvelle Aquitaine ou en Occitanie.
Un produit toujours frais, bien sûr de saison, pas forcément rare comme le souligne le chef Agenais qui fêtera l'année prochaine 30 ans d'installation.

Même adhésion pour Laurent Lemal, étoilé en 2014, formé entre autres chez Michel Dussau (un autre Agenais) et sacré Bocuse d'Or l'année dernière. À ce titre, après avoir représenté la France aux «Bocuse d'Or Europe» il va concourir au Bocuse d'Or Monde en janvier 2017.
Leur cuisine fait l'éloge de la simplicité et comme le souligne Michel Guérard, c'est la simplicité, l'épure qui est le plus difficile. Et le plus fascinant.


Laurent Lemal (au centre), Chef une étoile au Domaine Riberach à Belesta (66). / Photo DDM S.L.

Laurent Lemal : Ce sont les agrumes. Nous avons à Eus, à une vingtaine de kilomètres de Bélesta, le plus grand conservatoire d'agrumes d'Europe. Je travaille toute l'année avec eux et depuis que je suis à Bélesta, ça fait six ans maintenant, j'en découvre tous les ans de nouveaux.

Eric Mariottat : D'abord, c'est l'idée de ce qui s'est passé avant, de ce que nous ont laissés les anciens, les cuisiniers comme les grands-mères. C'est aussi l'identité d'un repas autour de trois produits, le foie gras, le canard et la truffe. Ce que je ressens, c'est un produit accompagné d'un lent mijotage et d'une bonne sauce. C'est une cuisine qui a une âme, qui nous transporte aux temps d'avant, une cuisine de cœur. Avant justement, on avait quatre canards, un arbre à truffes et on faisait un repas… Et aujourd'hui je m'inspire de ça pour faire une cuisine terroir contemporain, qui puise dans les racines et les fondamentaux du Sud Ouest.


Raie, courge, fenouil, agrumes / Photo FB, Laurent Lemal

Quelle est votre définition d'un menu de fêtes ?
Laurent Lemal : Ce doit être un menu qui donne le sourire aux lèvres. Il faut travailler sur le souvenir parce qu'on a tous en mémoire les souvenirs des repas de famille. Il faut faire le lien entre tradition et modernité.
Éric Mariottat : C'est un repas qui sera pris en famille ou entre amis, mais un repas bien accompagné. Pas forcément avec des produits de luxe mais avec des produits rares. Il faut prendre le temps de préparer et de manger pour apprécier. Il faut vivre l'instant présent autour des produits, c'est sûrement une certaine idée du bonheur. C'est comme cela que ces repas sont marqués dans notre mémoire : on se souvient de ces instants avec précision. Ma fille, par exemple, se souvient des omelettes norvégiennes que je prépare à Noël. Et ce sont ces souvenirs qu'il faut prolonger et construire.


Mise en valeur des produits du terroir par les "Toqués du 47" / Photo DDM

Au niveau des produits, qu'enviez-vous à la région voisine ?
Laurent Lemal : Rien, chaque terroir doit être respecté et pour ma part j'ai tout ce qu'il faut ici.
Éric Mariottat : En Occitanie, ils ont aussi de bons produits (rires) mais j'envie surtout le savoir-faire qu'ils ont pour les fruits et les légumes. J'envie aussi leur manière d'avoir remis au niveau leurs vins.

Quel est votre plat fétiche, votre signature ?
Laurent Lemal : L'association turbo, poireau et ris de veau.
Éric Mariottat. J'en ai deux, c'est l'assiette «tout canard» et les pieds de porc noir de Bigorre farcis au homard. Pour le canard, j'ai été inspiré d'une récitation que ma fille avait à l'école «c'est tout un art d'être un canard».


Bernard Bach : Un chef à emporter !



Bernard Bach, le Puits Saint-Jacques, à Pujaudran, dans le Gers / Photo DDM

Secret de chef > Bernard Bach sur «La liste» des réveillons. Suivant le principe des repas à emporter, le chef gersois des environs de Toulouse (son restaurant, «Le Puits Saint Jacques» à Pujaudran est situé à quelques minutes de Colomiers) joue la carte de l'exception. Il a mis au point deux menus festifs, à la hauteur de ses deux étoiles Michelin. Chacune de ses formules propose en entrée UN foie gras au torchon (candi de figues, navets et raisins), puis des ravioles de homard pochées, avec une variante en plat : poulette fermière, cuisses en daube de cèpes ou lièvre farci à la royale (foie gras, champignons et truffes). 

En dessert viendra un dôme croquant au chocolat Jivara, cœur coulant de passion*. Une belle manière de réveillonner comme au restaurant (de 165€ à 215€ pour 2 personnes), avec en plus «Bach à table», le livre de recettes et de rencontres que le chef a publié l'an dernier. Autre bonne nouvelle concernant Bernard Bach : il figure dans le peloton de «La liste» des 1 000 meilleurs restaurants du monde avec une note de 84, 25 sur 100 (en compagnie des Toulousains Michel Sarran et Yannick Delpech). Etablie par les appréciations de critiques gastronomiques et les avis récoltés sur les sites internet, La liste est remise à jour en temps réel.


A Samatan les amateurs restent fidèles au foie gras


Marché du gras à Samatan / Photo DDM

Le rituel est immuable. Tous les lundis, à Samatan dans le Gers, à l'heure dite, et quand la cloche retentit, le public est autorisé à entrer dans l'antre du bon goût. Auparavant, des deux côtés de la séparation (des grands rideaux en plastiques) délimitent l'espace ou le public attend et celui ou les producteurs vont s'installer, il règne cette même agitation contagieuse et conviviale. Surtout coté public ; ici, il y a les habitués et les novices. Et pour ceux qui découvrent, c'est un peu comme une initiation, un premier grand voyage.

Madeleine et Jean-Pierre viennent pour la première fois… mais ont sympathisé avec Francis et Hugues, deux «vieux habitués» selon leur expression. Les deux derniers, Toulousains et bon vivants assumés expliquent la «magie Samatanienne» aux deux premiers, venus en voisins du Lot-et-Garonne.

Cérémonial
Il est 10h 15, le public afflue sous la halle. Pas de bousculade mais une effervescence bon enfant parce que chacun est ici pour préparer les fêtes et l'achat des foies frais fait partie de cette préparation. Effervescence et un brin d'excitation aussi pour tenter de voir ce qu'il se passe de l'autre côté de ce rideau…

De l'autre côté justement l'ambiance est plus calme mais on sent bien que la pression monte. Les éleveurs sont arrivés tranquillement. Et se sont installé tout aussi tranquillement. Eux sont rodés à l'exercice et prennent place. Ils ouvrent leurs grands bacs dans lesquels trônent les foies, jettent un coup d'œil à leurs voisins de droite et de gauche pour voir, pour jauger, manière de prendre la température.


Gasconh'à Table met en valeur la filière gras à Samatan / Photo DDM, Nedir Debbiche

Pour eux, tous les lundis sont différents. «Il y a des lundis ou on voit plus de monde que d'autres. A quoi ça tient ? On pourrait dire que plu on s'approche des fêtes, plus il y a du monde et parfois c'est le mystère confie cette habituée» qui préfère rester discrète… Mais qui rajoute avec un grand sourire : «dites le bien à vous les lecteurs, ici, la qualité est toujours au rendez-vous, regardez mes foies, ils ne vous font pas envie ! Oui, dites-le parce que franchement dès qu'on parle de grippe aviaire on a l'impression que c'est pour faire peur».

De 30 à 36 € le kilo
10h 30, la cloche sonne, le bal est ouvert. Le public essaie de ne pas courir mais marche quand même beaucoup plus vite que s'il fallait aller travailler. Et en trois minutes la salle des ventes s'est remplie. Un peu comme de l'eau qu'on libérerait d'un coup, avec fluidité et un joyeux empressement.
On retrouve nos habitués, qui ont leurs fournisseurs mais qui regardent ce que les voisins proposent. Et notre couple de novice qui salive à l'idée des préparations futures.


Le marché au gras de Samatan./ Photo DDM, Sébastien Lapeyrère.

«Ils sont magnifiques, et les gens sont si gentils ici !» : c'est Madeleine qui parle et qui se sert de son téléphone portable pour calculer… Sous l'œil goguenard d'un éleveur qui lui tend sa propre calculette «regardez, les chiffres sont plus gros, mais pas plus cher, je suis à 36 € le kilo…»

L'hiver, depuis le premier lundi de novembre jusqu'au dernier lundi de mars, Samatan est bel et bien la capitale du foie gras avec à 9 h 30 la vente des carcasses et à 10h30 les foies gras. «Tous les lundis il se vend de 800 kilos à une tonne de foie gras à un prix qui oscille entre 30 et 36 euros le kilo» explique Didier Vilatte, le vétérinaire qui veille au bon déroulement du marché. Pour les quelque 300 éleveurs présents à Samatan, le rendez-vous est sacré. Pour les milliers d'acheteurs qui passent dans les travées, c'est le même sentiment, avec un côté «quête spirituelle» de l'esprit gascon qui s'invite aux repas de fin d'année.


Sur les marchés : Un terroir unique


Norvégien ou écossais, le poisson des Ets Méricq est fumé à Estillac, à côté d'Agen. / Photo DDM

Les huîtres > Entre Leucate et Bouzigues. En quelques années, les huîtres d'ici ont conquis leurs lettres de noblesse. De Bouzigues sur l'étang de Thau (34) à Leucate (11), des producteurs en petit nombre et au caractère bien trempé mènent l'élevage et l'affinage de coquillages de qualité. Le truc en plus : sans réseau de distribution, ils vendent souvent en direct des produits d'une fraîcheur indiscutable.

Le veau grain de soie > L'excellence des Pyrénées. Imaginé par des éleveurs comme Joël Vidou, le concept séduit les grands chefs et le grand public. Les meilleurs veaux déjà sous Label rouge sont sélectionnés pour leur qualité. Résultat une viande tendre et goûteuse et une viande «haute couture». Points de vente et recettes sur www.viandesgraindesoir.fr


Le Veau Grain de soie tisse sa réputation / Photos DDM, Rachel Barranco

Le veau du Ségala > Le vrai goût de l'Aveyron. Une épaule de veau, finement choisie sous le pavillon «veau du Ségala», qui va mijoter deux bonnes heures confite par un long séjour dans une cocotte : et c'est un autre univers qui s'ouvre. Entre souvenir d'une cuisine familiale et nouvelles saveurs, si vous tentez des associations de nouveaux légumes. Élevé sous la mère, sa saveur incomparable.

L'agneau de Barèges > Une saveur inoubliable. Produit en pays Toy, sur un territoire bien délimité par le cahier des charges, l'agneau de Bareges tient du délice. Et est une bonne alternative à la traditionnelle dinde. En gigot lentement mijoté, en navarin ou civet, les recettes garantissent un repas réussi.. A retrouver sur www.aop-bareges.com


Pierre Sajous présente l'un des trois petits porcs noir de Bigorre qui vivent près de sa boutique de Beaucens./Photo J. G.

Le porc noir de Bigorre > L'honneur du cochon. Reconnaissable à sa couleur (noir), le porc noir goûte pleinement les atouts de son terroir. Il tire son secret de la méthode d'élevage et de la manière dont il se nourrit. Surtout, depuis quelques années, il a été adopté par de nombreux chefs étoilés et se déguste sous différentes variations. Pour Noël tentez le cochon de lait farci, un must. Recettes sur www.porcnoir.fr.

Le saumon de l'Adour > La signature Barthouil. Installée dans les Landes, la maison Barthouil travaille le saumon depuis 1929. Et s'est spécialisée dans le saumon sauvage de l'Adour. On parle là d'une perle rare, aux qualités exceptionnelles qui le placent pour ceux qui l'ont goûté bien au-dessus des saumons étrangers. En quantité limitée. www.barthouil.fr.


Un acheteur de truffes lors du marché de Lalbenque / Photo DDM

La truffe > de Lalbenque à Moussoulens. De l'incontournable marché de Lalbenque aux rendez-vous du Lot-et-Garonne, de l'Aude ou du Tarn-et-Garonne, la truffe est une signature de la région. Et il n'en faut pas forcément beaucoup, une petite pincée pour que très vite votre plat prenne des accents de fête.

Le caviar de Riscle > L'or noir de Gascogne. Lancée il y a une trentaine d'années par Pierre Tachon, «Les Esturgeons de l'Adour» donnent «naissance» à un caviar gersois hors pair, distribué par la Maison Prunier, propriétaire de la pisciculture. Pisciculture aujourd'hui dirigée par Laurent Sabeau, qui propose également de la vente directe. Tel. 05 62 08 51 58.


Melons de Lectoure / Photo DDM, P.M.

Le carat de melon du Gers > L'innovation gourmande. Inventé il y a quelques années par Michel Glosek, le Carat de melon est un produit totalement atypique. Ce sont des pépites de melon, délicatement confites, peu sucrées. Ces pépites oranges translucides se servent froides et accompagnent aussi bien le foie gras (qu'il soit servi froid ou poêlé) comme le chocolat, le roquefort. A testez pour un effet surprise garanti. www.caratdemelon.fr.

Le roquefort > L'indétrônable. En entrée (poire au roquefort), sur un plat ou en dessert, seul ou accompagné, il reste le roi de la table. Fidèle compagnon il se prête à tous les accommodements (ou presque), avec souplesse et générosité). Sous le signe de l'Occitanie, on peut célébrer l'association Rancio (vin doux du Roussillon)- Roquefort sur un pain de campagne, en toute simplicité.


Caves de Roquefort / Photo DDM

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