Libération du Tarn : Maquis de Vabre
La Libération du Tarn - Série 1/8
Libération du Tarn : Maquis de Vabre
Publié le 13/07/2024 | La Dépêche du Midi | Richard Bornia
L’exemplaire résistance des maquis de Vabre
Le 14 juillet 1944, les maquisards de la vallée du Gijou défilent avec uniformes et armes. / Archives de l'amicale des Maquis de Vabre
Dans le cadre de notre série sur les 80 ans de la Libération du Tarn, gros plan sur Vabre la frondeuse, qui a alimenté de nombreux foyers de résistance, sous la houlette de Pol Roux, le préfet des maquis.
1 200 habitants aux deux tiers protestants. Vabre encaissé dans la vallée profonde du Gijou, voit sa vie bouleversée par la débâcle de l’armée française en 1940. Des réfugiés juifs travaillant pour beaucoup dans la confection parisienne (et donc en relation commerciale avec les entreprises vabraises) sont venus s’installer pour la durée de la guerre.
"Véronèse est un peintre" siffle à la BBC. Nous sommes le 5 juin 1944. Le code annonce le Débarquement et lance l'insurrection.
« Bien intégrés, certains gardaient leur carte d’identité et leurs voisins venaient retirer à la Mairie leur carte d’alimentation. À d’autres nous avons donné de vraies fausses cartes, la plupart avec un tampon imité de Carvin dans la Pas-de-Calais dont toutes les archives avaient disparu pendant l’offensive allemande de mai-juin 1940 », souligne, sur son site internet, l’Amicale des Maquis de Vabre.
Dès 1940, le conseil municipal donne les premiers signes de l’insoumission du village à la Collaboration. Si le portrait de Pétain est placé dans la grande salle de l’hôtel de ville, le buste de la Marianne républicaine trônera toujours dans ces lieux. Un terreau propice à l’éclosion de la résistance.
Différents responsables locaux de Vabre encadrent la jeunesse pour qu'elle ne soit pas embrigadée dans des organisations favorables à Vichy ou à l'occupant.
"Honneur et fierté"
Le 9 mars 1943, six jeunes protestants, réfractaires au STO (Service du Travail Obligatoire), s’installent dans le hameau de La Courrégé. Un maquis qualifié « d’attente », par Michel Cals, écrivain et spécialiste du Maquis de Vabre, car "il n’y a pas d’armes, pas d’organisation".
Durant l’été 1943, ils sont huit à s’installer à la Tourette et enfin, en décembre de la même année, les Éclaireurs Israélites de France (EIF), fondent le maquis de La Malquière dans une vieille ferme d’un hameau de la commune de Viane. Leur chef Robert Gamzon dira : "pour ne plus être des lapins, mais des bêtes qui ont des griffes et des crocs".
Image symbolique de ce que furent également les Maquis de Vabre (Club Athlétique Vabrais, basket)
Dans son mémoire « La résistance juive dans le Tarn », Valérie Ermosilla (Pietravalle) précise : "Cette intégration […] apporta honneur et fierté aux maquisards juifs, qui se voyaient ainsi reconnus par les non-juifs avec le droit de rester unis et de revendiquer leur identité juive".
La place du Terrier rebaptisée place du Maquis
La Résistance s’organisera autour de Guy de Rouville (alias Pol Roux), industriel vabrais, qui prendra la responsabilité du secteur 10 des Corps Francs de la Libération. 450 résistants seront formés, armés, organisés en 3 compagnies. Ils participeront aux combats de l’été 1944, à la libération de Castres, faisant 4 500 prisonniers allemands.
Les Allemands faits prisonniers lors de la libération de Castres ont assuré le service du banquet / Archives de l'amicale des Maquis de Vabre
Les officiers et leurs ordonnances seront amenés à Vabre par le petit train et serviront en uniforme, le 31 août, le fameux banquet des Cinq Cent, sur la place du Terrier, rebaptisée depuis place du Maquis. Pour avoir accueilli, protégé et sauvé de nombreuses familles juives et avoir accueilli le seul maquis juif de France, Vabre est inscrit au registre Villes et villages des Justes de Yad Vashem.
29 juillet, Isabelle et Louis se marient dans le maquis de Vabre Archives de l'amicale des Maquis de Vabre
Un mariage dans le maquis
29 juillet 1944, Pierre Boyer, maire de Vabre, officie. Isabelle venue du Havre épouse Louis Cebe dit Grizzly du maquis de Vabre. Dans son discours, le maire se lance dans une comparaison poétique : "Peut-être étiez-vous venue, Madame, comme une nouvelle hirondelle, nous annoncer, de Normandie, un nouveau printemps de liberté et vous êtes-vous laissé prendre dans les filets de l’oiseleur ? ".
Avant de conclure : "Partez vite faire bénir votre union, là-haut sur la montagne". Sur le site internet de l’Amicale des Maquis de Vabre, le marié raconte : « Le maquis gardait les entrées du village pour éviter toute incursion Allemande ».
À 780 kilomètres des plages normandes, les gares du Tortillard voient débarquer de nouvelles têtes, très nombreuses : au moins 35 le 6 juin 1944, jusqu'à 200 pour le mois !
Les tourtereaux rejoignent ensuite les bois. « Nous montons tous, amis et maquisards vers Camp soleil pour une émouvante cérémonie religieuse. Après cela, buffet champêtre, malheureusement, une charrette, chargée d’un tonneau de vin n’est jamais arrivée, au grand désespoir de tous les amis réunis, cela n’a pas empêché, grâce à cette amitié qui nous unissait tous, que règne une franche gaîté ce jour-là ».
Odile de Rouville, en 1943 sur cette photo, est en train de coudre des insignes du Club Athlétique Vabrais
EXPOSITION & ANIMATIONS
Le Tarn était libéré il y a 80 ans en août 1944. Une Libération conquise par la Résistance, notamment celle des Maquis de Vabre. Une exposition photographique conçue par l'Amicale va sillonner la montagne tarnaise : Murat en juillet et Vabre en août
L’Amicale des maquis de Vabre participe, avec des collectivités territoriales et d’autres associations de la montagne tarnaise, à l’organisation des 80 ans de la Libération du Tarn.
Cet été 2024, seront organisés conférences, expositions, temps de mémoire et animations (programme sur le site)
(Sce & Photos : Amicale des Maquis de Vabre : https://maquisdevabre.fr/ )
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