Réserve africaine Sigean : 50 ans

12/4/2024





Publié le 07/04/2024  | L'Indépendant |  Véronique Durand

50 ans de la Réserve africaine de Sigean :
Claude Pellier, le plus grand des « soigneurs »



Claude Pellier, l’homme qui vivait dans la réserve (2012) / ML, F. Tallieu

C’est la rencontre de deux fortes personnalités qui est à l’origine de la réserve africaine de Sigean qui fête ce lundi 8 avril ses cinquante ans : Daniel de Montfreid, architecte navigateur et fils de l’écrivain aventurier Henry de Montfreid et le comte Paul de la Panouse, créateur du parc animalier sur ses terres, le château de Thoiry dans les Yvelines. 
Tous deux saisissent l’opportunité de la mission Racine, qui redessine le littoral, pour y implanter leur projet. À savoir la création d’un parc animalier unique, à la fois par ses dimensions gigantesques, son côté naturel, la préservation et la reproduction d’espèces africaines abritées. 


Les lionnes ont pris leurs quartiers. / Ind, Ch. Barreau

Pour la réserve africaine dont ils rêvent, ils dénichent une zone naturelle entre garrigues, lagunes et étangs à l’embouchure de la Berre. Bénéficiant du climat méditerranéen propice à la faune, la réserve se trouve sur l’axe de passage des oiseaux migrateurs, qui longent la côte pour gagner l’Afrique. Ils sont dès lors des milliers chaque année à trouver naturellement refuge dans cet espace protégé, où ils bénéficient d’une halte nourricière et paisible, loin des chasseurs, avant le grand voyage. 
Un écrin qui abrite aujourd’hui 50 ans de l’histoire de ces animaux africains dont le plus beau témoignage d’adaptation est leur reproduction.


Quelques 2500 animaux sont présents au sein de la Réserve. / Ind, Ph. Leblanc

Il y a 50 ans jour pour jour, le 8 avril 1974, s’ouvraient les portes de ce parc de 80 hectares. Pour préparer l’ouverture de la réserve, un soigneur animalier de Thoiry, Claude Pellier, avait eu la lourde responsabilité de faire venir des animaux et de veiller sur eux. Nommé responsable zoologique à Sigean, il a s’est entouré d’une équipe de 10 soigneurs. 
"C’étaient des maçons, des viticulteurs, des menuisiers, que nous avons formés à l’élevage d’animaux exotiques. Nous avons fabriqué les clôtures, aménagé les espaces. Nous avons fait venir les premiers animaux dans des poids lourds depuis Thoiry, des jeunes lions, des koudous…"


Deux springboks  nés dans la Réserve / Ind

Claude Pellier sillonne les zoos de France et d’Europe pour récupérer des animaux… Mais pas que : "À l’époque, il n’était pas rare que des particuliers aient chez eux des animaux sauvages. C’est ainsi que nous avons récupéré des serpents, des ours, des singes, un guépard…"

Beaucoup de rumeurs
Rapidement il apparaît que les premiers ours du parc, de race lippu créent des problèmes : "Ils ont compris que les fenêtres de certaines voitures s’arrachaient facilement quand ils passaient les griffes et appuyaient très fort. 


Les animaux de la réserve évoluent en liberté dans la partie safari. / Ind, Ph. Leblanc

Et à la grande terreur des visiteurs, ils s’approchaient pour quémander de la nourriture et parfois n’hésitaient pas à se servir dans les voitures. C’étaient des "mordeurs", il y a eu des blessés et en quelques jours on s’est séparés d’eux, on les a remplacés par des ours du Tibet, plus paisibles".
S’il y a eu des incidents relatés, comme ce viticulteur qui eut la peur de sa vie en se trouvant nez à nez avec un lion dans sa vigne… Claude en réalité rectifie le tir : " c’est une rumeur ! En fait, il a cru voir un lion, de loin, sur une crête, mais c’était un mouflon dont les poils très longs sur le poitrail ressemblaient à une crinière". 


Un été à la Réserve africaine de Sigean / Ind, N. Parent

On a pu dire aussi qu’un un boa avait mystérieusement disparu. Pour Claude, c’est une légende. Mais celle dont l’évasion avait fait couler le plus d’encre, fut Viviane devenue en quelques heures l’ourse la plus célèbre de France. 
"Fin juin 2013, raconte Gabriel de Jesus, responsable de communication de la Réserve, il est possible qu’elle ait refusé les avances des mâles en rut trop entreprenants et qu’elle ait voulu s’éloigner, elle, la mamie du groupe qui a eu plusieurs portées mais n’a plus eu d’oursons depuis 2008..


Un été à la Réserve africaine de Sigean / Ind, N. Parent

" Elle fut retrouvée sur l’île Saint-Martin où elle coulait des heures paisibles près de la grotte du Chinois, débusquée à la faveur d’une chasse à l’ours rocambolesque. Vivaine est toujours vivante, elle a 42 ans et coule une fin devie tranquille dans le parc des ours du Tibet. 
"Nous avons eu des épisodes pas tristes ! Se souvient en souriant Claude Pellier : "l’année de l’ouverture du parc en 1974, des grands koudous avaient sauté la clôture, et, aidés des gendarmes qui avaient barré la route, nous les avions encerclés, comme un troupeau, et nous avons tenté pendant des heures de les faire rentrer…"


Vous pouvez observer et être au plus près des girafes en liberté. / Ind, Ph. Leblanc

Une autre fois, ce fut une girafe qui fit sensation, lorsque Claude, chargé de la récupérer à Marseille n’avait qu’une remorque dont la caisse était si basse que les automobilistes, à la vue de cet attelage sur l’autoroute n’en croyaient pas leurs yeux : "Elle baissait systématiquement la tête avant chaque pont comme si elle pensait qu’elle risquait d’être guillotinée !
" Mais alors qu’au début certains animaux étaient carrément au milieu des visiteurs dans le parc, les meilleurs souvenirs des enfants étaient certainement liés à Judy, une femelle chimpanzé. 


La naissance de bébés lycaons. / Ind, A. Joris

"Elle appartenait à un couple de Belges qui vivaient au Congo et, obligés de rentrer en Europe, ils nous l’avaient donnée. Judy était si intelligente qu’elle attrapait le trousseau de clés du soigneur, trouvait la bonne clé et ainsi ouvrait sa cage. Elle prenait parfois une serpillière et faisait le ménage, ou la vaisselle ! Elle a même donné le biberon aux lycaons. Mais comme, instinctivement, elle se méfiait des espèces carnivores, elle le faisait le bras tendu…"


Les flamands roses font partie des symboles de la Réserve africaine. / Ind, Ch. Baron


Sigean (11) / larousse.fr


Deux oursons nés à la Réserve / Ind




À l’évidence, la Réserve est un lieu de conservation des espèces, de médiation auprès du public mais aussi de surprises, de plaisirs… Et de sérénité. / Ind, N. Parent


 

Partagez sur les réseaux sociaux

Catégories

Autres publications pouvant vous intéresser :

Commentaires :

Laisser un commentaire
Aucun commentaire n'a été laissé pour le moment... Soyez le premier !
 



Créer un site
Créer un site