Les gorges de Galamus
Publié le 30/07/2020 à 07:29 | La Dépêche du Midi | Pierre Challier
Cubières-sur-Cinoble : Les gorges de Galamus, voies du vertige et de la sérénité…
Les gorges de Galamus (Aude), voies du vertige et de la sérénité… / DDM
Trait d’union entre l’Aude et les Pyrénées-Orientales, les gorges de Galamus relient les Corbières au Fenouillèdes. Avec ses parois vertigineuses entre lesquelles coule l’Agly… Hier, elles accueillaient des ermites, aujourd’hui, les amateurs de belles sensations.
Du lit du torrent montent des cris qui ricochent entre les interminables murs calcaires. Dévalant de cuvettes en baignoires, les amateurs de canyoning se régalent en bas. Et sur fond vert d’eau cristalline, les casques bleus ou rouges dessinent comme un petit collier de perle roulant entre deux cascades. Ce que l’on voit en se penchant sur les gorges de Galamus et… en se cramponnant au parapet quand on a le vertige. Car ici, la route taillée dans la roche serpente en balcon tutoyant le vide.
Niché dans la falaise, l’ermitage Saint Antoine./ DDM
"C’est le côté atypique des gorges, habituellement, les routes sont construites au fond des défilés, tandis que celle-ci a été réalisée à 250, 300 m de haut par rapport à la rivière. à l’entrée, les falaises font une dizaine de mètres puis elles grimpent jusqu’à 500", sourit Emilie Goby-Hy, chargée du tourisme à Cubières et dans le Limouxin.
Les gorges de Galamus… un nom comme une promesse de légende, de roman d’aventures. Et un site somptueux qui tient parole quand on le découvre en y descendant à partir de Cubières-sur-Cinoble… Pour situer ? On est à 70 km de Carcassonne, pile entre deux autres lieux emblématiques de l’Aude : Bugarach et son pic qui domine les Corbières et le château de Peyrepertuse, imprenable sur son piton.
Des voitures de sport dans la traversée des gorges de Galamus. / DDM
Ce faisant ? Après une petite halte à la singulière église de Cubières, dernier vestige d’un monastère disparu où se découvrent de mystérieuses empreintes de pieds d’enfants dans le très vieux dallage, et après une pensée pour Guilhem de Bélibaste, dernier "parfait" cathare né dans ce village, mort brûlé vif en 1321… Prendre la direction de Saint-Paul-de-Fenouillet, suivre la pente des eaux qui taillent la muraille et… attendre son tour à l’entrée "puisque l’été, nous mettons en place un trafic alterné vu l’étroitesse de la voie, ce qui permet aussi aux piétons et randonneurs d’en profiter sans danger", expliquent Emilie Goby-Hy et Maryse Baillat, maire de la commune, un panneau rappelant que l’accès est interdit aux caravanes et camping-cars, vu sa hauteur aussi…
L’occasion alors de se garer pour flâner en descendant à pied cette route et comprendre que… le premier exploit officiel qui prit place dans ces gorges fut bien le percement même de ce passage, taillé à la main dans la masse à la fin du XIXe siècle.
Le canyoning est l’une des activités proposées par Eaurizon pour découvrir le territoire audois d’une autre manière. / DDM
"à l’époque, il avait été prévu pour les carrioles, les chariots, pour les échanges entre Corbières et Fenouillèdes. Légumes, bois, céréales contre huiles et vins… On allait commercer à la foire de Saint-Paul-de-Fenouillet, à 9,5 km d’ici. Avant la route ? Il fallait passer par les crêtes sur un chemin muletier. Ma grand-mère l’a fait… Ça prenait la journée", explique Maryse Baillat.
Pour la montagne, ces 1,9 km gagnés sur le vide résonnèrent alors comme une grande victoire sur une nature "hostile", lorsque la voie fut achevée en 1892, rappelle une plaque commémorative posée à la sortie, après le tunnel et avant le belvédère du parking, au sud, d’où s’embrasse l’immense embrasure de la faille. "Dans ce roc pelé que troue la sabine/Où l’aigle dans son vol osait seul venir/Pendu par une corde avec la barre à mine/L’homme comme l’oiseau a trouvé un chemin", a écrit le poète Léonces Rives, en français et en occitan.
Le paisible cours d’eau s’écoule dans un environnement hostile. / DDM
Pas d’aigle, ce matin. "Mais les isards se sont installés sur le versant en face", pointe Emilie. Un brin moins agiles, les canyoneurs remontent ruisselants et ravis derrière leur guide, "la pratique étant interdite sans accompagnement", précise le maire. Environ 90 000 visiteurs par an…
Autrefois, l’entrée des gorges était un "désert", un lieu âpre, loin des affres du monde où se retiraient les ermites en quête d’élévation spirituelle, témoigne toujours l’ermitage Saint-Antoine de Galamus, accroché à la falaise.
Une visite dans le respect du paysage magnifique. / DDM
Descente sans trop regarder en bas ni lâcher la rampe… S’ouvre alors un havre de sérénité sous le platane planté en 1 782 à l’abri du surplomb, près de la grotte sanctuaire. "Le cadre toujours spectaculaire, ça représente beaucoup d’émotion, mais ici, on a un sentiment de protection", résume Jérôme Occipenti, tenant la buvette-souvenirs.
Pénombre de la chapelle s’enfonçant dans la roche, dizaines de remerciements et ex-voto à Saint-Antoine… Deux messes et un pèlerinage annuel célèbrent toujours le saint des "Tentations" né en Egypte au IIIe siècle. Ne pas résister à celle de découvrir le lieu et l’humble tombe du dernier ermite, mort il y a 150 ans.
Dans les bassines calcaires de Galamus / DDM, Christian Goutorbe
/ OT
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