Poste : La fin du timbre rouge

20/10/2022


Publié le 08/10/2022 à 14:33  | La Dépêche du Midi |  Philippe Rioux

Courrier : derrière la fin du timbre rouge, la mutation de La Poste


 / Photo  ANTOINE BERLIOZ
    
Confrontée à une baisse du trafic du courrier et aux nouveaux usages, La Poste a annoncé cet été une nouvelle gamme tarifaire qui fait disparaître l’emblématique timbre rouge et le remplace par une lettre électronique. La fin de ce symbole illustre la profonde mutation de La Poste dans laquelle les syndicats voient une dégradation du service public postal.

Le 1er janvier 2023, une page de l’histoire postale va se tourner ; une page de l’Histoire tout court aussi : la fin du célèbre timbre rouge dont l’existence remonte à 1849. Pour les uns, cette disparition, annoncée au cœur de l’été, est un nouvel exemple de l’abaissement d’un service public, pour les autres, et La Poste au premier chef, il s’agit d’une indispensable refonte pour répondre aux nouveaux usages des clients. Car la réalité est que l’envoi de courriers est concurrencé depuis plusieurs années par internet et ses courriels distribués quasi instantanément – une pratique encore davantage utilisée lors de l’épidémie de Covid – et que son volume a considérablement diminué.

« En 2020 la chute des volumes de courrier s’est accélérée et le service universel postal, l’une des quatre missions de service public de La Poste, est devenue lourdement déficitaire (à hauteur de 1,1 milliard d’euros) », explique La Poste, qui a reçu de l’État, le 22 juillet 2021, une dotation budgétaire annuelle de 500 à 520 millions d’euros selon les résultats de qualité de service, pour compenser une partie de ce déficit du service universel postal. À cette situation se sont ajoutées au fil du temps les difficultés pour La Poste de garantir la livraison le lendemain (J+1) du timbre rouge.

Passage au numérique
« L’utilisation de la Lettre rouge tend à disparaître ; les ménages envoyaient 45 Lettres prioritaires par an en 2010, seulement 5 en 2021. Les moyens numériques, mails, SMS etc. ont été largement adoptés pour les envois urgents. D’un autre côté, pour la majorité des usages du quotidien, envoi de documents administratifs, cartes postales, petites marchandises, c’est la Lettre verte qui est choisie et plébiscitée par les clients », assure La Poste, qui souligne que « les attentes exprimées par les 22 000 clients professionnels et particuliers consultés par La Poste se concentrent autour de la fiabilité de la distribution, des services de suivi du courrier et de la prise en compte de l’impact environnemental. »


La nouvelle offre courrier / DDM

Fort de ces constats, La Poste a donc revu son offre. Le timbre rouge est remplacé par une lettre numérique, la e-Lettre rouge « envoyée depuis laposte.fr jusqu’à 20 heures, imprimée par La Poste à proximité du destinataire, dans le respect de la confidentialité du contenu, et distribuée le lendemain sous enveloppe arborant un dessin de timbre rouge. » Cette e-Lettre sera commercialisée à partir de 1,49 € (pour 1 à 3 feuilles) contre 1,43 € pour la Lettre prioritaire aujourd’hui, le coût de l’enveloppe et du papier étant compris.

Suit la Lettre verte avec son timbre vert (à partir de 1,16 € avec option suivi à 0,50 €), distribuée à J+3, et une nouveauté, la Lettre turquoise services plus. Proposée à partir de 2,95 € (prix variable en fonction du poids jusqu’à 2 kg), cette nouvelle lettre offre davantage de services de traçabilité et peut être prise en charge depuis sa boîte aux lettres personnelle par le facteur.
À l’heure où chaque foyer français consacre en moyenne 37 € par an aux envois postaux (courrier et colis) contre 45 € en 2016, La Poste espère mieux répondre aux attentes de ses clients avec cette nouvelle gamme tarifaire, qui, selon l’Arcep, le régulateur, répond « au principe d’abordabilité posés par le cadre législatif et réglementaire. »

Colère syndicale et pétition
Mais là où La Poste voit dans sa nouvelle e-Lettre rouge un symbole d’adaptabilité et de modernité, écologiquement plus vertueuse – et l’espoir de réaliser 100 à 150 millions d’euros d’économie par an – d’autres perçoivent un nouvel affaiblissement du service public postal. Relevant que « la politique tarifaire a aussi participé de la désaffection du timbre rouge avec une hausse de 33 % ces trois dernières années », le syndicat Sud-PTT déplore que « pour ses dirigeants comme pour ses actionnaires (l’État et la Caisse des Dépôts), La Poste doit se transformer en une machine à cash, quoi qu’il en coûte à la collectivité. »

Sud-PTT demande depuis l’été « le gel de la nouvelle gamme courrier » et a lancé une pétition en ce sens, « On se bouge pour le Timbre Rouge » sur la plateforme Change.org afin que le débat soit sur la place publique. Plus de 21 000 personnes l’ont déjà signée.


 

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