Le MIN de Toulouse alimente les tables de fêtes

25/12/2014

  Le MIN de Toulouse alimente les tables de fêtes 

Publié le 24/12/2014 à 08:44 | La Dépêche du Midi |  Pierre Challier

Tous les goûts du monde au «Rungis» toulousain

Croisement de transpalettes sur le quai des fruits et légumes / Photo DDM P.C.

Les premiers arrivent vers 4 heures. Lorsqu'au ballet des semi-remorques succède celui des fourgonnettes venant se garer «de cul» au quai devant les «cases» des concessionnaires en fruits et légumes. Alignement blanc sur fond d'alu et de néons froid. Dans le petit matin glacial, tout semble figé, l'espace d'un instant. Puis le rideau s'ouvre. Et le son, les couleurs et les odeurs du monde envahissent l'écran comme entrent en scène les acteurs emmitouflés. Transbahutant des dizaines de cagettes d'oranges, de tomates, de fruits exotiques ou de légumes. S'alpaguant. Se hélant. Chorégraphie rapide mais impeccable entre livreurs et livrés… et bienvenu au M.I.N., le Marché d'intérêt national de Toulouse métropole, où se joue le dernier rush des primeurs, épiciers et commerçants «de plein-vent» avant Noël.

«Marché Gare» comme l'appellent ses habitués et les 900 personnes qui y travaillent, ou encore «le Rungis toulousain» comme le baptise un costaud pressé, façon d'aller à l'essentiel avec le visiteur qui découvre ce «ventre» du Grand Sud... justement classé deuxième derrière Rungis, à l'échelon national, et s'étendant sur 20 hectares où se commercialisent bon an mal an «280 000 tonnes de produits pour un chiffre d'affaires de 335 millions d'euros», détaille Claude Sandeyront, directeur général des lieux. Des lieux très surveillés, puisqu'en vigipirate, mais aussi parce qu'ils sont «réservés aux commerces de proximité, restaurants, grandes surfaces et marchés de neuf départements», précise-t-il, rappelant que, par définition, ici, la vente aux particuliers est interdite et qu'il faut donc y prévenir sévèrement toute tentation de trafics illicites.

Un mardi matin (mai 2013) au marché gare de Toulouse./Photo DDM Xavier de Fenoyl

Marée, produits carnés, fleurs et pratiquement tout ce que la terre fait pousser de comestible… épicier à Blagnac, Serge Escande, lui, arrive pour se fournir en fruits et légumes frais, «avec des produits festifs pour Noël», explique-t-il, tandis que son fils Nicolas, qui tient un magasin à Fronton, se gare à côté de lui. Classiques de saison, tels l'ananas ou la clémentine de Corse «sur lesquels on force un peu», mais aussi raisin de tradition… «On picore de case en case, selon nos besoins», explique Serge qui revient avec des champignons, «des pleurotes à farcir, un plat de fête», tandis que Nicolas rapporte des navets de Grenade-sur-Garonne avant de repartir au pas de charge.

Car ici, quel que soit le jour, qu'on soit grossiste ou détaillant, et même si cet en avant fêtes, «on a fait le plein vendredi pour l'essentiel et on est là pour faire le complément»… «il faut aller vite» des piles à l'étal. Témoin, l'extraordinaire ballet que font les transpalettes chargés de cageots, se croisant au millimètre et pilotés par des professionnels à l'élégance de barreurs, s'équilibrant à droite, à gauche selon la direction du flux, la force du courant, le piéton égaré sur la trajectoire…Petite «magie» du quotidien que rompt un «putain, ça pèle» sonore. Mais tout de vérité.

Fruits et légumes au MIN / Photo toulouse-tourisme.com

«Et les fraises, ça n'aime pas ce froid», pointe l'un. 1°C sur le quai : ça doit effectivement les changer de leur égypte natale, les fraises. Mais leur rouge plaira-t-il aux clients ? Certes, «à Noël, les gens se lâchent, ils se font plaisir», assure Omar qui fait beaucoup de fruits exotiques, Côté Jardin, rue des Filatiers. Mais Philippe, son voisin du marché des Carmes, secoue la tête.

«On ne sait pas sur quel pied danser, on nage dans une joyeuse incertitude. ça fait 35 ans que je suis dans le métier et cette année on n'arrive pas à prévoir. L'essentiel, c'est de faire plaisir à notre clientèle mais sans se planter au niveau du stock et de la marchandise achetée. Ce qui marche, ce sont les agrumes, toujours, mais à Toulouse, il faut aussi avoir un petit peu de raisin, car Toulouse ayant un pied en Espagne, ça reste la tradition de manger du raisin aux fêtes».

Autrefois ? «Il y avait d'ailleurs le chasselat de Noël, qui se conserve très bien. Mais aujourd'hui, on trouve surtout de l'Italia de Sicile ou du raisin d'Espagne». L'autre «incontournable» ? C'est l'ananas. De l'avion-cargo au camion et du camion à l'utilitaire, les poupées russes du transport le livrent par tonnes. Du Cameroun ou du Bénin. Forme étrange, allongée en l'occurrence : «Les Béninois, c'est l'ananas «bouteille» ou «pain de sucre»», précise un connaisseur.

Le MIN (Marché d'intérêt national) de Toulouse se visite tous les matins./Photo DDM, archives Xavier de Fenoyl.

Wiiizzz sur le quai. «Attention ! C'est le radiologue ! Le radis-ologue», se marre Denis Miotto qui transporte donc ses radis vers le carreau des producteurs ouvrant à 6 heures. Dans un quart d'heure. Le temps de prendre le café Chez Marc, avec Anne-Marie Busatto. Chapeau élégant, fourrure… «Cela fait 52 ans que je fais le marché, autrefois comme maraîchère avec mes parents à Saint-Jory. J'avais 14 ans à l'époque et maintenant, trois fois par semaine je viens pour mon fils qui tient le Carrefour City de Saint-Jean. Pour le gros, la centrale le livre et moi je viens lui faire le complément», explique-t-elle, pendant qu'on lui prépare ses radis.

Carreau ouvert, Chez Marc se vide. Mais arrivent Yannick, Jean-Pierre et Olivier. Qui s'attablent et sortent leurs carnets. Font le point. S'arrangent une commande. Ils sont de La Salvetat Saint-Gilles, Cazères «capitale du meileur kiwi», assure Jean-Pierre, et L'Isle-Jourdain. Noël ? «On fait beaucoup plus d'exotique et comme il ne faut jamais dire «non» pendant les fêtes, il faut avoir ce que n'ont pas les autres», résument-ils. Du crosne du Japon, par exemple. Du pitaya vietnamien, autrement appelé «fruit du dragon», aussi. Mais surtout… «de la truffe». Benoît rejoint la tablée. Justement, c'est lui le spécialiste au Jardin de Papy Ly, à Balma. Un peu de Lalbenque mais surtout de la Carpentras… «Pour la truffe française, Noël avec le Nouvel An, c'est 80 % des ventes», explique-t-il, gourmet, gourmand et passionné, vous la tendant pour humer. Ah ? Et ? Jusqu'à 1500€ le kilo...?


Dans la nouvelle halle aux fleurs du MIN. / Photo DDM M. Viala

Sinon, eh bien «il y a le citron caviar, citron dont les petites billes éclatent en bouche comme le caviar, ça vient d'Amérique et c'est à 300 € le kilo», indiquent les collègues, «où si vous voulez être à la mode, il y a le yuzu, c'est chic et un peu bobo, ça coûte 80 € le kilo et seule l'écorce sert à parfumer les plats», poursuivent-ils.

Tous les goûts du monde, dont il ne faut négliger aucun ! «Tout ce qui pousse sur la Lune et plus loin !», avance même Didier Pigasse, bonnet de père Noël sur la tête et spécialiste du fruit exotique. Cerises du Chili ou de Patagonie, main de Bouddha, Pitaya jaune, incomparable cousin du fruit du dragon mais aussi poires de terre, canne à sucre ou oca du Pérou, chez lui se poursuit la symphonie de couleurs et de fragrances. Seulement voilà, «cette année, c'est le bordel, il y a eu la grève des routiers qui nous a perturbés, puis du retard sur les avions et tout le monde veut de l'ananas victoria pour les corbeilles !» explique-t-il. Car la corbeille… cela reste aussi un must. Et la spécialité de Jacques Palmer et son fils Patrick, partis à 3 heures de Lannemezan. 150 commandées pour Noël, 200 pour le jour de l'An, mais ils ont aussi une autre tradition : privilégier les belles oranges, les Nanou, les Bollo et Llusar… L'orange sur la cheminée, souvenir fugace. Le seul cadeau de Noël autrefois, se souviendra aujourd'hui plus d'un…


Publié le 29/09/2014 à 08:02  | La Dépêche du Midi |  Silvana Grasso

Marché d'intérêt national : le «ventre de Toulouse» a 50 ans

Citrouilles, salades, tomates, poivrons… Un tableau vivant pour le peintre Arcimboldo.  /Photo DDM, F. Charmeux

Le Marché d'intérêt national (MIN) de Toulouse fête ses cinquante ans. L'occasion de rappeler l'histoire de cette immense halle qui ne compte pas moins de 4 000 acheteurs.

Cinquante ans, le bel âge. Le Marché d'Intérêt National (MIN) de Toulouse et ses 395 producteurs locaux ont fêté l'événement. Car le MIN- désormais sous la houlette de Toulouse Métropole, actionnaire à 85 %- est le deuxième après Rungis sur le territoire national avec une surface de 20 hectares et une palette de métiers regroupant toutes les filières,depuis la marée aux produits carnés via les fruits et légumes et l'horticulture.

Son rôle ? Alimenter à 95 % les exposants des marchés de plein-vent de Toulouse et de Midi-Pyrénées ainsi que les grossistes et les restaurateurs. «Le MIN est un outil de développement économique incontournable pour la région, une source de traçabilité, rappelle fièrement Claude Sandeyront, directeur général. D'où l'intérêt pour un producteur d'y être présent. C'est aussi une grande famille attachante».


Le MIN, le plus grand marché de Toulouse / Photo DDM

Quatre fois moins de producteurs
Un marché avec une histoire qu'aime rappeler avec bonheur Gérard Mery, producteur de légumes : «Jusqu'en 1964, le MIN était sur la place Arnaud-Bernard, sous une halle en fer et une immense horloge qui rythmait le temps. Ici, c'était la campagne avec des vignobles. Le marché a déménagé en grande partie pour la voie ferrée et la gare de triage de Saint-Jory, bien pratiques». Jo Gareil, maraîcher depuis ses 18 ans et président de la profession se souvient : «J'ai connu la voie ferrée et la gare qui amenaient les marchandises, d'où l'appellation de marché gare». Et de citer l'arrivée des pommes de terre de Bretagne et des bananes du port de Dieppe. «Une année, les pommes de terre sont arrivées de Pologne car la production manquait en France».

À l'époque, 1200 producteurs venaient sur le fameux «carreau». Ils ne sont plus que 350. Une chute brutale liée à l'âge avancé de la profession et à la difficile relève des jeunes. Jean-Jacques Bolzan, président du MIN de Toulouse Métropole veut «inciter les jeunes à découvrir ses métiers notamment par le biais de l'école». Un brin nostalgique, Jo égrène ses souvenirs : «Avant les prix étaient discutés fermes sur le carreau. Aujourd'hui, les portables travaillent en amont. Quand l'acheteur arrive à 6 heures, 80 % de la marchandise est déjà vendue. Il sait tout à l'avance».

Ballet de chariots sur le carreau du MIN / Photo DDM DR

50 ans, c'est aussi l'occasion de re (découvrir) le savoir-faire des professionnels. Notamment la filière fruits et légumes regroupée autour de 24 grossistes et de 450 mètres de linéaires. Dans cet antre de couleurs, de variétés, on découvre aussi des fratries. Commes Soulages et Frères, grossistes depuis 1978 : «À l'époque, nous avions 56 m2. Aujourd'hui, c'est 1 300 m2. De 80 grossistes on est tombé à 20. En rachetant les espaces vides, on a fait fructifier l'affaire». La famille travaille 70 h/semaine et s'accorde huit jours de congé annuels : «Une vie de bidochon d'où la difficulté d'avoir une relève». Plus loin, il y a Michel Rambla, 3e génération de primeurs : «Avant 100 % des acheteurs s'approvisionnaient sur le MIN. C'est désormais 30 %. Les autres achètent directement aux producteurs. Dommage». Didier Pigasse est spécialiste du légume insolite qu'il dit aller chercher «sur la lune». Dont le cerfeuil tubéreux, le plus coûteux des légumes anciens. Le MIN, ventre du Sud-Ouest a toujours des surprises au coin des cageots.

Dans l'immense Halle aux fleurs et plantes du Marché gare de Toulouse / Photo DDM, Frédéric Charmeux

Sélection d'articles réalisée à partir du site : http://www.ladepeche.fr


Le secteur fruits et légumes du MIN / Photo DDM
 

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