Tarn : Des histoires sur les gabarres

5/2/2025

Tarn : Des histoires sur les gabarres

Publié le 23/08/2024 | La Dépêche du Midi | Correspondant

Le Tarn murmure ses histoires
aux passagers des gabarres

Les croisières en gabarres permettent de redécouvrir la rivière Tarn DDM - EMILIE CAYRE

1 h 45. C’est le temps qu’il faut pour remonter la rivière Tarn d’Aiguelèze jusqu’à Albi… et toutes les histoires que raconte la rivière.

10 h sur le port d’Aiguelèze, les 40 passagers de la gabare sont au rendez-vous pour faire la « remonte » jusqu’à la cité épiscopale d’Albi. Le capitaine Arthur Legrand cède le gouvernail au mousse Fabrice, qui fait des promesses au micro. « Vous verrez beaucoup d’oiseaux ».

Tarn : une croisière en gabarre entre nature et culture / DDM

Pas faux : dès la roselière, la famille des hérons (pourpier, cendré) et des aigrettes (blanche, gardette) est au rendez-vous. Le barrage, en surélevant l’eau de 20 mètres, a créé un envasement propice à la croissance des roseaux, abri naturel lors des nichées et des coups de vent.

Au cours des 1 h 45 minutes de croisière, les commentaires abordent tous les sujets : faune et flore, mais aussi évolution de la rivière où le courant attaque la rive concave et ses falaises, et colmate la rive convexe, créant des hauts-fonds et des bancs d’argile.

Albi avec la cathédrale en fond / DDM - Emilie Cayre

Deux ponts
La gabare passe sous les deux ponts de Marssac, le ferroviaire et le routier, ouvert de « dégueuloirs » entre les arches, ces trous qui laissaient passer la crue et soulageaient les piles. Sur les rives, des cabanons modestes et des villas cossues : « c’est le petit Arcachon » commente le guide.

Plus loin, vers Terssac d’autres maisons tutoient la falaise. « Leurs occupants peuvent les occuper mais pas les vendre. C’est un héritage empoisonné ».

Le Tarn se resserre. Sans le savoir, le groupe passe au-dessus de six écluses immergées, la rivière devient sauvage. Un martin-pêcheur vole en rase-mottes. « Les oiseaux profitent des vagues du bateau qui rabattent les poissons vers la berge ».

Le festival d’autan s’invite sur l’eau / DDM, MPV

Arthur raconte les convois de cinq ou six gabares derrière la grosse « capitane » et les petits gabarrots qui les suivaient : eux ne faisaient pas la remonte, ils étaient désossés à Bordeaux, leurs planches confectionnaient des tonneaux.

On salue Jack, l’unique cormoran du secteur : blessé par un coup de fusil, il n’a qu’une aile mais se tient en faction sur un bois flottant. Son œil et son long bec s’occuperont des ablettes imprudentes. Il pêche en nageant. Arthur corrige quelques clichés.

« Un cormoran mange plus qu’un silure. Le cormoran, c’est trois fois par jour, le silure ingurgite plus gros, mais une fois par semaine, surtout des espèces migrantes très peu les autochtones ».

Après Castelnau-de-Levis et son ancien port voué aux cabanons de pêcheurs à la ligne, on entre dans le grand méandre, la rivière s’évase : à gauche, l’hôtel La Réserve, à droite le golf de Lasbordes et leurs pelouses rasées de frais.

En gabarre au fil du Tarn, en sirotant des vins de Gaillac / DDM, Emilie Cayre

Une ancienne écluse
On se croit arrivé mais le Tarn contourne Albi par le nord. Il reste à passer l’ancienne écluse du moulin de Lamothe. Fabrice gère au centimètre : « rentrez les coudes messieurs-dames ».

Le pont de chemin de fer se profile. Arthur Legrand raconte la construction de la passerelle, les travaux de consolidation du pont Vieux, partiellement ferraillé, « peut-être le plus ancien de France », les crues de 1766 et 1930 qui atteignaient presque le tablier.

Demi-tour au pied de la jetée pour « le » joyau et l’épilogue de la remonte : la cité épiscopale et son rempart, diadème de la cathédrale. Le groupe est ravi. « Gardez vos billets pour le retour, on larguera les amarres à 17 heures ».

Devant les anciens moulins albigeois / DDM