XV : France-Galles 2007 vu par Yannick Jauzion
Publié le 13/03/2017 à 07:48 | La Dépêche du Midi | Propos recueillis par Philippe Lauga
10 ans plus tôt, Yannick Jauzion se souvient :
«C'était un Tournoi particulier»
Yannick Jauzion, 73 sélections en équipe de France / Photo DDM
Tournoi des VI Nations - France-pays de galles dix ans plus tôt. Yannick Jauzion se souvient de cette édition avant la Coupe du monde.
Ce Tournoi-2007 se situe avant la Coupe du monde. Qu'est ce que cela a changé dans la préparation ?
C'était un tournoi particulier dans le sens où il y avait au moins une trentaine de joueurs qui étaient réunis à Marcoussis. Et c'est la première fois où la Fédération avait réussi à négocier que tous les joueurs restent pendant sept semaines à Marcoussis sans revenir dans leurs clubs respectifs. Il y avait une préparation spécifique. C'était lever 6 heures du matin et du physique, une préparation assez hard. Et l'emploi du temps a été très vite modifié.
À la fin ceux qui n'ont pas joué le Tournoi ont joué avec les Barbarians contre l'Argentine. Des Argentins heureux et motivés face à des Français fatigués. Cela n'a pas servi aux joueurs qui ont fait ce match car ils n'ont pas montré leur meilleur visage. Plus généralement, il y avait l'idée de gagner le Tournoi pour se positionner avant la Coupe du monde. C'était également un contexte où il y avait les dernières places à gratter.
Journées des Ambassadeurs 2017 à Thonon / Photo FB, Top 14
Vous débutez donc avec un match en Italie et une rencontre plutôt facile à gérer…
Oui je me souviens d'un score assez large (N.D.L.R. : 39-3). Un match satisfaisant mais tout n'avait pas été parfait. Les Italiens avaient eu beaucoup le ballon au début de la rencontre mais on avait eu une défense très solide et on avait récupéré des ballons sur turnover. On avait bâti le match comme ça.
Nous avions été très solides et au-dessus du lot physiquement mais j'avais eu le sentiment également que les Italiens étaient bien en place. D'ailleurs, ce fut leur meilleur Tournoi avec leur premier succès à l'extérieur.
Yannick Jauzion, formé au Sporting Club Graulhétois / Photo DDM
C'est le seul match de ce Tournoi où vous évoluez alors avec votre compère de l'attaque toulousaine Florian Fritz.
Oui, il avait un hématome au niveau du tibia. Il était gêné pour courir. Et du coup, avec moins de moyens, tu joues moins bien.
Il a perdu la place pour la Coupe du monde sur ce Tournoi. Il a fait partie des joueurs qui étaient dans le groupe bis. Pour lui, ce fut frustrant parce qu'il a été en équipe de France à «x » reprises (12, N.D.L.R.) avant ce match-là.
Et du coup c'est avec David Marty que vous formez la paire du Tournoi…
Oui, on a joué ensemble ce Tournoi et après c'est avec lui qu'on a fait la plupart des matches de Coupe du monde. Il y avait aussi le choix de me faire jouer avec Damien Traille, mais on avait un peu le même physique. Il fallait de la complémentarité. David Marty était un joueur qui avait beaucoup d'envie, qui était bon défenseur et capable de faire de bonnes passes. Après, la paire s'est plus ou moins arrêtée sous l'ère Lièvremont.
XV de France : Yannick Jauzion, la force tranquille / Photo DDM
Que retenez-vous du deuxième match en Irlande ?
Essentiellement, l'essai de Vincent Clerc. Ce jour-là, on fait plus ou moins jeu égal avec l'Irlande mais sur la dernière action, on fait preuve de pragmatisme et de réalisme et Vincent tire son épingle du jeu. Cette action va beaucoup lui servir dans l'optique de la Coupe du monde. Ce jour-là, il a montré à Bernard Laporte qu'il était dans une autre dimension et Bernard lui a fait confiance. Même si Vincent n'a pas débuté la Coupe du monde, quand il a fallu modifier le groupe, c'est une action qui lui a servi. Je retiens également que le match avait lieu exceptionnellement à Croke Park et non à Lansdowne Road. On avait senti la dimension historique, ce que pouvaient avoir en mémoire les Irlandais. Forcément, il y avait donc des émotions supplémentaires mais on était bien resté ciblé sur l'objectif sportif. Je me souviens également d'un stade beaucoup plus grand et beaucoup plus large.
Dublin, c'est une ville qui vous a réussi globalement…
Oui j'ai pas mal de bons souvenirs puisqu'en 2003, on gagne la Coupe d'Europe avec le Stade Toulousain. Avec l'équipe de France, on avait également gagné un match à Dublin pour la centième de Fabien Pelous. C'était une passe au cours de laquelle on maîtrisait bien les Irlandais. On avait une forme d'ascendant psychologique sur eux. Mais je garde aussi l'image de contextes particuliers où on sent bien que les gens aiment le rugby et où l'ambiance est particulière.
Yannick Jauzion parrain des Pavois du Tarn en 2015 / Photo DDM
Vous avez souvent joué contre Brian O'Driscoll ? Quel joueur était-il ?
C'était un centre difficile à jouer, notamment quand on était en position de défense. C'était quelqu'un qui avait beaucoup d'appuis et qui était capable de changer de direction à tout moment. Il était très difficile à saisir quand il avait le ballon et s'appuyait sur une bonne complémentarité avec D'Arcy. Après, c'était un bon défenseur, mais ce n'était pas le plus gros défenseur même s'il était capable de gêner la défense par ses montées rapides. Il savait s'adapter mais ce n'était pas un gros défenseur d'homme à homme.
Le troisième match vous oppose au pays de Galles et vous gagnez 32-21…
On les a laissés un peu dans la course tout au long du match par des fautes un peu bêtes et des erreurs de défense. Ils marquent trois essais rapidement sans faire dix temps de jeu. Cela nous a permis de nous reconcentrer et de reprendre nos axes de travail pour préparer le match suivant à Twickenham.
Yannick Jauzion./ Photo DDM Xavier de Fenoyl
Cette rencontre en Angleterre fut-elle une déception ?
Oui, on est passé un peu à côté ce jour-là même si les Anglais ont fait leur match. On sentait qu'on avait vraiment la capacité de gagner mais on n'avait vraiment pas été bon dans la précision, la justesse, la complémentarité. Ce fut un jour sans. À la fin, on a senti de la déception chez les joueurs et dans le staff. Ce qui n'était pas toujours forcément le cas à Twickenham parce que souvent, la défaite était logique. Mais là, on a senti qu'on était passé à côté du match et que le staff attendait vraiment autre chose.
Et enfin, il y a cette dernière rencontre un peu particulière face à l'Écosse parce que le Tournoi va se jouer au goal-average général. Vous jouez après l'Irlande et vous savez qu'il faut gagner de plus de 23 points pour dépasser l'Irlande.
C'est sûr qu'on connaissait avant le résultat de l'Irlande et on savait par quel écart il fallait gagner. Ce qui était quand même beaucoup plus facile pour nous. Durant cette rencontre, il y avait beaucoup de volume de jeu, cela jouait dans tous les sens et les Écossais ont été débordés. Ce fut dur à digérer pour les Irlandais parce qu'on a marqué à la fin grâce à Elvis Vermeulen. Un essai accordé après arbitrage vidéo qu'on peut ou ne pas accorder. Grâce à cet essai, on remporte le Tournoi et on se positionne favorablement par rapport à la Coupe du monde.
Lors de la première édition des Trophées des sports du conseil général du Tarn en 2014 / Photo DDM
Ce Tournoi-2007 reste-t-il votre meilleur souvenir de Tournoi des VI Nations ?
Je garde également un bon souvenir du Tournoi-2010. C'était sous l'ère Lièvremont. C'était plus compliqué parce qu'il y avait moins de résultats mais sur ce Tournoi, on avait senti qu'il y avait une bonne ambiance et un bon état d'esprit. Et c'est cela qui avait fait la différence pour remporter le Grand Chelem.
Vainqueur au goal-average...
Il restera comme un Tournoi historique marqué par la première victoire à l'extérieur de l'Italie depuis son intégration dans le Tournoi en 2000. Une victoire (37-17) en Ecosse. À domicile, l'Italie évoluait encore dans la petite enceinte de Flaminio. Les Irlandais en étaient les favoris mais ce sont les Français qui l'ont emporté au goal-average général alors qu'avant la dernière journée, trois équipes pouvaient encore gagner l'épreuve : l'Irlande, la France et l'Angleterre.Dans l'ensemble, pour toutes les équipes, à sept mois de la Coupe du monde, le Tournoi a servi de laboratoire avec une grande revue d'effectif.
On retiendra de cette édition, l'essai de Vincent Clerc à Croke Park dans le temple des sports gaéliques ; Lansdowne Road étant en travaux. Souvent barré par le trio Dominici, Rougerie, Heymans, le Toulousain a saisi l'opportunité de troubler la hiérarchie avant la Coupe du monde. On retiendra également la blessure du pilier parisien Sylvain Marconnet… au ski (double fracture tibia-péroné).
Yannick Jauzion sous le maillot bleu / Photo DDM
Yannick Jauzion digest
Né le 28 juillet 1978
> Trois-quarts centre. 1,93m; 100 kg
> Clubs successifs : Graulhet, Colomiers, Toulouse
> Palmarès en club: champion d'Europe (2003, 2005, 2010), champion de France (2007, 2011, 2012)
Palmarès en équipe de France : Grand Chelem (2004, 2010); vainqueur du Tournoi 2007; demi-finaliste de la Coupe du monde (2003, 2007)
> 73 sélections en équipe de France
> Première sélection,le 16 juin 2001 en Afrique du Sud (victoire 32-23)
> Dernière sélection, le 12 mars 2011 à Rome face à l'Italie (défaite 22-21).
> Statistiques en Bleu: 20 essais, un drop
Yannick Jauzion est passé ! / Photo DDM, Xavier de Fenoyl
France - Pays de Galles 2007
Nous étions le samedi 24 février 2007 pour la troisième journée du Tournoi. Pour la France, il s'agissait de la première à domicile après deux voyages victorieux en Italie (39-3) et en Irlande (20-17) et avant un dernier déplacement en Angleterre.
> 24 février 2007 au Stade de France
FRANCE bat pays de Galles 32-21 (MT : 23-14)
80 000 spectateurs; arbitre : M. Spreadbury (Angleterre).
Vainqueurs : 2 E Dominici (28), Nallet (34). 2 T , 5 P (10, 18, 38, 45, 52) Skrela. 1 P Beauxis (80).
Vaincus : 3 E Popham (12), Shanklin (14), Robinson (74). 3 T S. Jones
Evolution du score : 3-0, 3-7, 3-14, 6-14, 12-14, 20-14, 23-14/26-14, 29-14, 29-21, 32-21.
FRANCE : Poitrenaud (Toulouse), Dominici (Stade Français), Marty (Perpignan), Jauzion (Toulouse), Clerc (Toulouse) (o) Skrela (Stade Français), puis Beauxis (75, )(Stade Français) (m) Mignoni (Clermont); Bonnaire (Bourgoin), Vermeulen (Clermont) puis Harinordoquy (68, Biarritz), Betsen (Biarritz); Thion (Biarritz), Nallet (Castres) puis Lamboley (75, Toulouse); Mas (Perpignan) puis Marconnet (63, Stade Français), Ibanez (cap) (Wasps) puis August (75, Biarritz), Milloud (Bourgoin).
Ne sont pas entrés en jeu : Yachvili (Biarritz), Rougerie (Clermont)
Entraîneur : Bernard Laporte
PAYS DE GALLES : Byrne; M. Jones, Shanklin, Hook, S. Williams (o) S. Jones (cap), Peel; M. Williams, R. Jones, Popham; A.W. Jones, Gough; Horsman, Rees, Jenkins.
Les autres matchs des Français - 3 février à Rome, FRANCE bat Italie 39-3 - 11 février à Dublin, FRANCE bat Irlande 20-17 - 24 février au stade de France, FRANCE bat pays de Galles 32-21 - 11 mars à Twickenham, Angleterre bat FRANCE 26-18 - 17 mars au stade de France, FRANCE bat Ecosse 46-19 > Le classement final 1 - France, 8 pts (+ 69) 2 - Irlande, 8 pts (+ 65) 3 - Angleterre, 6 pts (+ 6) 4 - Italie, 4 pts 5 - Pays de Galles, 2 pts (-27) 6 - Ecosse, 2 pts (-58)
Avec Vincent Clerc / Photo DDM, AFP
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