Libération du Tarn : Pratlong, Espérausses
Libération du Tarn : Pratlong, Espérausses
Publié le 17/08/2024 | La Dépêche du Midi | | Richard Bornia
Un abbé pacifique,
acteur méconnu de la reddition de Castres
Le site de Pratlong, commune d'Espérausses
Dans le cadre de notre série sur les 80 ans de la Libération du Tarn, coup de projecteur sur le rôle méconnu de l’abbé Cugnasse, qui a transformé son petit séminaire d’Espérausses en une base arrière du maquis.
La ville de Castres a été libérée le 21 août 1944. Sous le commandement de Pierre Dunoyer de Segonzac, les maquis de Vabre seront en première ligne. Ils attaquent d’abord un train allemand à Labruguière avant de conquérir sur la ville sous-préfecture.
Pratlong, petit séminaire
Grâce à un coup de bluff magistral (notre édition du 9 août 2024), 4 200 soldats ennemis se rendront à 300 maquisards, sans combattre, évitant ainsi un bain de sang. Ils seront transférés à Vabre, où ils serviront, sur la place du village, un banquet pour 500 maquisards.
Cette libération a été précédée d’une série d’actions commandos pour saper le moral de l’occupant. L’école de Pratlong, une ancienne ferme située à Esperausses, dans les Monts de Lacaune, a un rôle majeur dans cet évènement. Elle servira de base arrière pour les cadres de la Résistance pour préparer la capitulation de l’occupant à Castres.
Guy de Rouville, alias « Pol Roux », à la tête des maquis de Vabre, y installe à ses côtés, le commandant Dunoyer de Segonzac et de nombreux maquisards. Grâce au silence de la population qui n’a jamais parlé, jamais trahi, toujours soutenu, c’est un refuge idéal.
Chapelle de Pratlong
"Ce n’est que plus tard que j’ai pris conscience des risques que nous prenions"
Depuis 1942, ce séminaire dirigé par l’abbé Gilbert Cugnasse accueille les personnes pourchassées, sans distinction de race, de nationalité et d’origine. C’est un véritable havre de sécurité pour les maquisards, les Juifs et les réfractaires au STO.
"Je savais que les Juifs étaient plus en danger que les autres. Mais à Pratlong on ne faisait pas la différence. Quelqu’un arrivait en détresse. Était-il Juif ou pas ? Souvent je n’en savais rien. J’étais là pour les aider et je n’avais pas peur. Ce n’est que plus tard que j’ai pris conscience des risques que nous prenions", déclare, après-guerre, l’abbé.
Réfectoire de Pratlong
Ceux qui l’ont fréquenté disent de lui que ce religieux a toujours été du côté de ceux qui recevaient des coups. En 1944, on y retrouve aussi des personnalités comme Hubert Beuve-Méry, fondateur du journal Le Monde à la Libération (lire notre encadré), le philosophe Emmanuel Mounier ou encore l’écrivain Jean-Marie Domenach.
« L’abbé Cugnasse a spontanément fait du séminaire 'l’infirmerie du maquis'. C’est ici que furent prodigués les premiers secours aux blessés des opérations de harcèlement contre les convois militaires allemands », précise le Comité Français pour Yad Vashem qui le reconnaîtra Juste parmi les Nations en 1999 pour son courage extraordinaire.
L’abbé Gilbert Cugnasse / Wikipedia
« En février 1944 après le combat de Martinou, près de Lacaune, où plusieurs jeunes trouvèrent la mort, une quinzaine de rescapés vinrent se réfugier à Pratlong où ils furent nourris, réconfortés et logés dans une grange. […] », confessera plus tard, ce curé exceptionnel. Fuyant les honneurs, les médailles et autres distinctions, il sera nommé en 1985 curé d’Anglès, une paroisse de campagne, proche de la nature, des oiseaux, des champignons qui ont toujours été l’un de ses centres d’intérêt.
Il est décédé à Mazamet le 20 octobre 2010 et inhumé au cimetière de Saint-Pierre-des-Plôts. Le pigeonnier est désormais une chapelle-mémorial. En 1947, cette rotonde au toit pointu a été couverte de fresques et de peintures de Nicolas Greschny, prestigieux fresquiste du XX° siècle.
Ferme de Pratlong
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