Dans le cadre des "Rendez-vous aux Jardins" organisés ce week-end par le Ministère de la Culture, plusieurs séries de visites sont programmées pour découvrir le Jardin de Saint-Jean à Graulhet, récemment baptisé "Jardin de la Rivière", et inauguré jeudi dernier 4 juin.
Ce nom de Jardin de la Rivière a été choisi pour mettre en avant le Dadou, en écho à l'aménagement récent de la Plaine de Millet, mais aussi pour faire référence aux "rivières", nom donné aux pièces inférieures des usines de tannerie ou mégisserie dans lesquelles débute le travail de la peau.
Certaines de ces visites étaient accompagnées par Arnaud Maurières, créateur paysagiste de renom, qui a conçu le jardin graulhétois. Il a ainsi explicité sa démarche, son premier soin en arrivant sur la ville ayant été de repérer dans les jardins existants les principales espèces de végétaux les composant.
Le premier secteur est constitué par l'allée de palmiers (chinois car plus rustiques), disposés serrés pour réaliser une frondaison continue, qui s'inspire des alignements d'arbres plantés en ville le long de certaines rues ou avenues. Au pied des palmiers, des carex, graminées qui conservent leurs feuilles en hiver.
Pour Arnaud Maurières, "un jardin est un lieu privilégié où tout est permis". Sur Graulhet, il a imaginé un jardin ouvert, en cohérence avec la végétation existante (notamment sur la rive gauche du Dadou) et les constructions de la ville ancienne qui seront restaurées dans les prochaines années.
Sur la partie plate ont été plantés des figuiers (une quinzaine de variétés différentes), des arbres de judée, des cognassiers, des grenadiers, des cyprès. Des massifs de plantes aromatiques (sauges, lavandes, armoises, romarins) et herbes médicinales structurent l'espace.
Deux pergolas toutes simples, pouvant être réalisées par tout bon bricoleur du dimanche, serviront de support à des rosiers, des chèvrefeuilles ou de la vigne vierge, plantes caractéristiques de nos régions.
Face aux ruines du moulin, un amphithéâtre aux marches larges et irrégulières a été créé dans la continuité des enrochements existants. De gros rochers pouvant servir de sièges lors d'évènements ponctuels alternent avec des plantes sauvages qui tiennent le talus et ne nécessitent pas d'entretien particulier. Des albizias, arbustes originaires de la Mer Caspienne, dominent l'ensemble.
Afin de relier la partie haute du jardin à la berge du Dadou deux séries de gabions, remplis de galets de rivière, enserrent chacune un escalier ; le terme de gabion fait également référence aux anciens ports implantés sur les cours d'eau.
Les talus aménagés de part et d'autre des gabions ont été adoucis, débarrassés des décombres qui les formaient et enrichis de bonne terre. Ils sont couverts de graminées et de plantes vivaces rustiques.
Ce jardin s'étend sur une surface de 6000 mètres carrés ; ayant été réalisé par les services techniques de la ville son coût a été réduit de moitié et représente un prix de revient équivalent à celui d'un rond-point, a estimé son concepteur.
Les végétaux utilisés ont été choisis "pour laisser faire la nature" en suivant les saisons, nécessitant un entretien réduit et une irrigation limitée. La plupart sont des plantes rustiques et familières, souvent appelées "mauvaises herbes"...
Arnaud Maurières, avec son partenaire Éric Ossart, a piloté de nombreux projets. En France, on retrouve leur empreinte à Cordes sur Ciel (Jardin des Paradis), Menton, Eygalières, Paris, Uzès, Chaumont sur Loire ou dans le Cantal. Ils ont aussi réalisé des jardins en Tunisie, Égypte, Syrie, Maroc ou Mexique...
Des visites commentées sont organisées ce dimanche 7 juin 2015 à 10h, 11h, 14h et 15h.
La description du Jardin sur le site du Ministère de la Culture :
La création de ce jardin public par les paysagistes Arnaud Maurières et Éric Ossart fait partie du plan de réhabilitation des friches industrielles de la ville de Graulhet et de la mise en valeur de la rivière Dadou et de ses berges comme voie verte et douce, la circulation est organisée autour de gabions et de pergolas qui donnent une perspective sur la rivière. Les plantes utilisées pour créer ce jardin sont notamment choisies parmi les "mauvaises graines", ce sont des plantes rustiques adaptées à un sol pauvre et au dispositif de gestion différenciée des espaces verts mis en place par la Ville. Une collection d'arbres fruitiers a été constituée pour permettre aux usagers de cueillir des fruits (figuiers, grenadiers, cognassiers, vigne, etc.). Pour finir, une palmeraie (62 palmiers résistants au froid) borde la rue Saint-Jean. Ce jardin s'inscrit dans le projet scientifique et culturel qui préfigure l'évolution de la maison des métiers du cuir.
Mise à jour :
Inauguration : L'article de La Dépêche du Midi
Publié le 11/06/2015 à 07:51 | La Dépêche du Midi |
Le jardin de la Rivière prend son envol
Le créateur du jardin a pu expliquer la genèse de cet ambitieux projet./Photo DDM, J-C C.
C'est en présence d'Arnaud Maurière, son concepteur, que le jardin de la Rivière a été inauguré.
Ce moment a été l'occasion de revenir sur la genèse et les polémiques autour de ce «poumon vert» en centre-ville de Graulhet, qui est désormais accessible à tous.
«Il y a dix ans, la rue Saint-Jean et ses usines étaient une menace pour la santé et la sécurité des habitants et donnaient à Graulhet l'aspect d'une ville morte», expliquait Claude Fita, maire de la commune, dans son discours inaugural, soulignant : «Démolir est parfois indispensable, mais tout en conservant notre mémoire, comme à la Maison des métiers du cuir située à deux pas d'ici. Démolir des bâtiments ce n'est pas nier le passé, mais le dépasser».
Outre la réhabilitation d'anciennes usines, ce jardin public tourné vers le Dadou permet à chacun de se réapproprier les berges d'une rivière aujourd'hui poissonneuse qui retrouve ses lettres de noblesse dans un quartier longtemps oublié.
Arnaud Morière, le «papa» de ce jardin durable, est revenu sur les polémiques : «Nous ne nous attendions pas à de telles polémiques. Ces palmiers, chinois, résistent au gel et on les retrouve dans beaucoup de jardins du sud de la France depuis le XIXe siècle. Pour les essences utilisées ici nous n'avons d'ailleurs choisi que des essences que l'on retrouvait déjà dans la ville», a-t-il souligné avant de revenir sur les «mauvaises graines», nom de travail du projet : «Nous avions été traités de mauvaise graine dans un article de Paris Match. C'est la raison pour laquelle nous étions partis sur cette idée. Les mauvaises graines, dans l'histoire, c'était nous», a-t-il souligné avec humour.
La plaque inaugurée pour l'occasion souligne la participation des financeurs. Sur un budget global de 200 000 euros, études comprises, la création du jardin n'aura coûté à la ville que 110 000 euros.
C'est-à-dire qu'elle a pu s'offrir un jardin d'exception pour le prix d'un giratoire, ce qui est, en dehors de la réalisation de ce projet, une autre raison de se réjouir pour les élus présents lors de cette inauguration.